Très critique envers les pratiques et les politiques du gouvernement fédéral à l'égard des soldats malades ou blessés au combat, l'ombudsman des anciens combattants, Pat Stogran, a appris cette semaine que son mandat ne serait pas renouvelé. Un geste que l'opposition voit comme un nouvel affront des conservateurs, accusés d'écarter les gens qui sont trop critiques à leur égard.

Et la liste des récriminations du colonel à la retraite Pat Stogran est longue: délais interminables dans le traitement des demandes d'indemnités, veuves abandonnées par le système, malades qu'on refuse d'aider par manque de preuves que leurs problèmes de santé sont liés à leur travail dans les forces armées...

«Je suis ici pour dénoncer un système qui depuis longtemps refuse de donner aux anciens combattants non seulement ce à quoi ils ont droit, mais aussi ce qu'ils ont mérité par leur sang et leurs sacrifices», a lancé M. Stogran, mardi, en conférence à Ottawa.

Accompagné d'anciens combattants frustrés qui ont vu leur dossier se perdre dans les dédales bureaucratiques du Ministère, l'ombudsman a affirmé que c'est parce qu'il a bien fait son travail qu'il se fait maintenant montrer la porte. C'est aussi l'avis des trois partis de l'opposition à Ottawa.

«C'est en train de devenir un pattern de ce gouvernement, a estimé le critique du NPD en matière de défense, Jack Harris. C'est arrivé à Peter Tinsley, président de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, dans le dossier des documents sur les détenus afghans. C'est arrivé à Paul Kennedy, qui était président de la Commission des plaintes du public contre la GRC, et à Linda Keen, congédiée pour avoir sonné l'alarme sur les dangers du réacteur nucléaire de Chalk River.»

«Malheureusement, c'est fâcheux, mais le gouvernement a tendance à vouloir se débarrasser des personnes qui ont une divergence d'opinions avec leurs politiques», a renchéri le député libéral Marc Garneau.

La députée bloquiste Christiane Gagnon croit elle aussi qu'Ottawa pourrait en faire plus. Elle a souligné que «le gouvernement dit qu'il faut appuyer nos troupes, mais il doit aussi faire face à ses responsabilités quand les soldats reviennent».

Critiques entendues

Le ministre des Anciens combattants, Jean-Pierre Blackburn, a affirmé, en entrevue à La Presse, avoir écouté les suggestions du colonel Stogran et tenu compte de ses critiques, notamment sur la question des longs délais dans le traitement des demandes des anciens combattants. «On est en train de travailler là-dessus», a-t-il assuré, rejetant les allégations de congédiement précoce de M. Stogran.

«Un ombudsman ne peut pas s'attendre à être automatiquement renouvelé à la fin de son mandat. Le colonel a pris le flambeau pendant trois ans. C'est un travail difficile. Pour l'indépendance de la fonction, maintenant le fardeau va passer à quelqu'un d'autre», a conclu le ministre Blackburn.

Le gouvernement conservateur de Stephen Harper a créé le poste d'ombudsman des anciens combattants en 2007, afin de répondre aux demandes et plaintes qui s'accumulaient. Pat Stogran est le premier à avoir été nommé à ce poste. Son mandat se termine en novembre.