Israël a demandé au Canada de représenter ses intérêts au Venezuela après que le régime d'Hugo Chavez eut rompu ses relations diplomatiques avec l'État juif dans la foulée des bombardements de la bande de Gaza par l'armée israélienne en 2008 et 2009.

Le gouvernement conservateur de Stephen Harper a signé une entente avec le gouvernement israélien à ce sujet le 7 août 2009, révèlent des documents que La Presse a obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Cet engagement est d'ailleurs toujours en vigueur.

Le Venezuela a pour sa part demandé à l'Espagne de représenter ses intérêts à Jérusalem.

La décision du gouvernement israélien de demander à la diplomatie canadienne d'être ses yeux et ses oreilles à Caracas, capitale du Venezuela, démontre que le Canada est désormais l'un des alliés les plus fidèles et les plus solides d'Israël, selon des experts interrogés par La Presse.

«Il est à espérer que l'accord visant à représenter les intérêts d'Israël au Venezuela permettra au Canada de jouer un rôle constructif pour faciliter la communication (...) entre les gouvernements du Venezuela et d'Israël», peut-on lire dans des notes d'information rédigées à l'intention du ministre des Affaires étrangères du Canada, Lawrence Cannon.

Visite au Venezuela

En janvier 2010, le ministre d'État aux affaires étrangères responsable des Amériques, Peter Kent, a fait une visite officielle au Venezuela, la première d'un ministre canadien depuis l'arrivée au pouvoir d'Hugo Chavez, en 1999.

Le ministre Kent, qui a déjà déclaré dans le passé qu'une «attaque contre Israël est une aussi une attaque contre le Canada», a rencontré des membres de la société civile, des gens d'affaires et des membres de la communauté juive du Venezuela. Il s'est aussi rendu à la synagogue Maripérez, qui a été la cible de vandalisme en janvier 2009.

«L'ambassade du Canada au Venezuela suit de près la situation des droits de la personne au Venezuela et la situation de la communauté juive», affirme le document.

Depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs, en 2006, le Canada s'est résolument rangé du côté d'Israël dans les conflits qui l'opposent à ses voisins.

Au cours d'une visite officielle au Canada, au mois de mai, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, avait déclaré: «Je me réjouis de l'occasion de passer du temps avec le premier ministre Stephen Harper, un homme de vision et de conviction, ainsi qu'un grand ami d'Israël et un champion de la paix», avait-il déclaré.

Échec à l'ONU

Ce changement de cap du Canada vis-à-vis du Proche-Orient a été cité comme l'une des causes de son échec dans sa tentative d'obtenir un siège non permanent au Conseil de sécurité des Nations unies, cette semaine.

«Cela ne m'étonne absolument pas qu'Israël se soit tourné vers le Canada pour représenter ses intérêts au Venezuela», a affirmé hier Rachad Antonius, professeur de sociologie à l'Université du Québec à Montréal et spécialiste du Proche-Orient.

«C'est une collaboration qui suppose une certaine convergence d'opinions politiques. C'est tout à fait concevable que des pays s'épaulent mutuellement et cela ne soulève pas de problème. Mais dans ce cas, le problème principal, c'est l'appui que le gouvernement conservateur donne à la politique d'occupation des territoires palestiniens, qui, elle, viole non seulement le droit international, mais aussi les principes canadiens. Il le fait de manière plus agressive que les gouvernements précédents», a ajouté M. Antonius.

- Avec la collaboration de William Leclerc