L'échec à obtenir un siège au Conseil de sécurité de l'ONU ne doit pas être vu comme une rebuffade de la communauté internationale à l'égard du Canada, estime le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon.

Au terme d'une année où le Canada a été propulsé à l'avant-scène internationale, avec la tenue, notamment, des Jeux olympiques à Vancouver et des sommets du G8 et du G20 à Toronto, M. Cannon dresse un bilan positif de 2010, et il juge que le Canada n'a rien à se reprocher.

«Il n'y a pas de dossiers où le Canada a subi des rebuffades. Au contraire, cette année a été remarquable pour le Canada», soutient le ministre, en entrevue de fin d'année à La Presse.

Pourtant, pour la première fois de son histoire, le Canada a échoué, à la mi-octobre, à obtenir le siège temporaire qu'il convoitait au sein du principal organe de décision de l'ONU. L'Allemagne et le Portugal, contre qui se battait le Canada, ont obtenu davantage de votes de la communauté internationale. Le gouvernement conservateur de Stephen Harper, après avoir boudé les Nations unies pendant ses premières années au pouvoir, a fait campagne intensivement dans les semaines qui ont précédé le vote crucial.

Et si c'était à refaire? «Nous ferions exactement ce que nous avons fait. On a mené une bonne campagne, qui faisait la promotion des valeurs canadiennes, et qui en même temps était basée sur des principes non négociables», soutient le ministre Cannon, qui juge que le Canada n'a pas à «faire des compromis» sur ses positions à l'étranger.

Minimisant l'importance de ce revers diplomatique, il estime que le Canada continue à jouer un rôle important sur la scène internationale, notamment par son engagement dans les organisations comme le G8 et l'OTAN.

L'année 2010, sur le plan international, a aussi vu le gouvernement canadien revenir sur sa décision de rapatrier l'ensemble de ses soldats d'Afghanistan en 2011. En novembre, le premier ministre Harper a annoncé la prolongation de la mission militaire du Canada jusqu'en 2014, pour assurer la formation des forces de sécurité afghanes. Pour le NPD et le Bloc québécois, le gouvernement a ainsi renié sa promesse de soumettre au vote des parlementaires toute mission où les soldats canadiens seraient déployés en zone de guerre.

«L'engagement du gouvernement, lorsque nous avons pris le pouvoir, c'était d'aller devant le Parlement lorsque nous engagions nos troupes dans une mission de combat, explique le ministre Cannon, justifiant la décision de son gouvernement. Maintenant, on met fin à notre mission de combat et c'est un rôle complètement différent pour la période post-2011. Parce qu'ultimement, la clé pour la transition, c'est la formation.»

Les soldats canadiens, rappelle-t-il, sont présents dans 14 théâtres d'opérations dans le monde actuellement, de l'Afghanistan à la Palestine, en passant par Haïti, le Soudan et le Kosovo.

Une mission moins risquée

«Chaque fois qu'on envoie des troupes des Forces canadiennes pour maintenir et soutenir la paix ou pour prodiguer des soins humanitaires, on ne demande pas aux parlementaires canadiens s'ils sont consentants ou pas. Le gouvernement prend des décisions dans le meilleur intérêt des Canadiens», soutient M. Cannon.

Mais alors que l'opposition craint que les soldats canadiens se retrouvent tout de même dans des zones dangereuses, compte tenu de l'instabilité du pays, le ministre se veut réconfortant. «Ils vont travailler dans un environnement qui est bien protégé, dans des régions où il y a moins de violence. Le niveau de dangerosité est pratiquement nul», dit-il.

Par ailleurs, la situation en Haïti continuera de préoccuper le Canada dans les prochains mois, avec la tenue prévue d'un deuxième tour de scrutin, après l'élection générale du début décembre, entachée d'irrégularités, dans un pays qui n'en finit plus de gérer des crises - tremblement de terre dévastateur, épidémie de choléra, etc.

«Nous faisons pression, en ce moment, pour que soit respecté le processus électoral qui a débuté. Ce processus doit respecter les normes, les niveaux de performance auxquels on est habitué», prévient M. Cannon.

Le Canada et les États-Unis ont haussé le ton dans les dernières semaines, jugeant que les autorités haïtiennes devaient assumer leurs responsabilités dans le dossier et assurer le retour de la paix sociale, après les épisodes de violence qui ont éclaté à la suite de la publication des résultats partiels du premier tour.

Quant au continent africain, jugé parent pauvre de la politique étrangère du Canada dans les dernières années, pas question de réduire l'engagement actuel d'Ottawa, souligne le ministre. Si M. Cannon concède qu'il fait actuellement une «réévaluation» des intérêts canadiens dans la région, il nie les rumeurs voulant que le Canada s'apprête à fermer plusieurs de ses ambassades en Afrique.

«Je serais fort surpris à la fin de cet exercice-là qu'il y ait des fermetures qui viendraient ternir l'image que le Canada a en Afrique, souligne-t-il. C'est possible de réaménager. Mais grosso modo, l'engagement du Canada en Afrique va demeurer semblable.»

Sans hésitation, M. Cannon affirme qu'il se présentera de nouveau aux prochaines élections, peu importe quand elles se présenteront. Mais il ajoute, en faisant écho aux propos du premier ministre Harper, que le gouvernement conservateur ne veut pas d'un scrutin au printemps et que ce sera donc à l'opposition d'en porter la responsabilité.