Le gouvernement Harper a commis un outrage au Parlement, ont conclu jeudi les députés d'opposition qui siègent à un comité des Communes, estimant qu'ils n'ont toujours pas reçu l'information nécessaire pour évaluer les coûts de certains projets de loi.

Cette conclusion -qui pourrait écrire une page d'histoire- est contenue dans une ébauche de rapport qui n'a pas encore été adoptée, les conservateurs ayant fait de l'obstruction pour empêcher la tenue d'un vote à ce sujet, jeudi.

Cela fait quatre mois que l'opposition réclame le détail du coût de 18 projets de loi déposés par le gouvernement pour appuyer ses mesures de loi et d'ordre et aussi celui des réductions d'impôts consenties aux grandes entreprises.

Malgré deux jours de témoignages en comité cette semaine et le dépôt de chiffres supplémentaires, les partis d'opposition jugent qu'ils n'ont pas encore assez de détails. Sans non plus avoir obtenu d'excuse valable de la part du gouvernement pour justifier son refus, ont-ils ajouté.

La semaine dernière, le président de la Chambre des communes, Peter Milliken, avait jugé que l'information incomplète transmise par le gouvernement constituait à première vue une atteinte aux privilèges des parlementaires, qui ont le droit d'examiner les dépenses publiques.

Pour éviter le blâme, le gouvernement pouvait fournir plus de documents ou en offrir une justification valable pour son refus.

Le gouvernement a échoué sur les deux plans, a conclu l'opposition.

Lundi, le comité doit donc adopter un rapport qui formulera ses recommandations à la Chambre des communes.

Puisque l'opposition est en majorité sur les comités parlementaires -reflétant la composition du gouvernement minoritaire- ses conclusions, dont celle d'outrage au Parlement, vont vraisemblablement faire partie du rapport.

Si un vote peut avoir lieu lundi, a prévenu le leader parlementaire du Parti libéral, David McGuinty.

«Les conservateurs vont faire de l'obstruction autant qu'ils le souhaiteront», a-t-il déploré, jugeant à l'avance qu'ils vont gaspiller le temps de réunion pour éviter la tenue du vote, comme ils l'ont fait jeudi.

«Si Stephen Harper ordonne à son équipe d'essayer de tuer ce rapport, croyez-moi, ils vont le faire».

Mais c'est le Parlement en fin de compte qui peut décider du sort du gouvernement, après un vote sur le rapport du comité.

Le geste serait historique puisqu'aucun gouvernement canadien n'a encore été trouvé coupable d'outrage au Parlement.

Mais pour l'instant, on ignore quelles seraient les conséquences d'une accusation d'outrage.

Car l'opposition n'a pas encore déterminé ce qu'elle va recommander à ce sujet.

Cela fera aussi l'objet de discussions lundi et l'opposition pourrait suggérer un vote de défiance envers le gouvernement, un geste qui pourrait le faire tomber et déclencher des élections.

Quant aux troupes de Stephen Harper, elles maintiennent que le gouvernement a fourni toutes les informations nécessaires et s'opposent à une déclaration d'outrage.

«Nous croyons fermement que nous avons satisfait pleinement aux exigences de la décision du président (Peter Milliken)», a réitéré le député conservateur Tom Lukiwski au terme de la réunion du comité.

«L'opposition voulait cette détermination d'outrage avant même d'avoir entendu les témoignages», a-t-il dénoncé, l'accusant de vouloir se faire du capital politique avec toute cette affaire.