Le ministre fédéral de la Justice a rejeté lundi une suggestion de l'Association du Barreau canadien portant sur les peines minimales, et a réaffirmé que les juges canadiens jouissaient déjà d'une marge de manoeuvre suffisante pour faire leur travail adéquatement.

Dans une résolution adoptée par le Barreau, les avocats canadiens font valoir que les juges devraient avoir davantage de latitude pour imposer une peine, surtout dans les cas où des injustices pourraient en découler.

Mais le ministre Rob Nicholson a affirmé lundi devant la conférence annuelle de l'association, à Halifax, que son gouvernement ne comptait pas mettre une croix sur ses projets de loi en matière de justice criminelle.

«Il y a plusieurs peines minimales prévues dans la loi et je crois que celles que nous avons créées sont raisonnables et appropriées», a-t-il fait valoir, ajoutant que les règles permettaient aux juges d'utiliser leur discrétion dans les situations appropriées.

Le ministre de la Justice a affirmé que les Canadiens avaient confié au gouvernement le mandat de faire adopter son projet de loi omnibus pour durcir les règles en matière de lutte à la criminalité. Le projet de loi avait été déposé aux Communes mais il n'a pu être adopté avant le déclenchement des élections générales du 2 mai dernier.

Le projet de loi contenait plusieurs nouveaux éléments, dont l'imposition de nouvelles peines minimales et maximales pour le trafic de drogue organisé et les crimes sexuels.

Les conservateurs devraient déposer à nouveau le projet de loi dès la rentrée parlementaire à l'automne. «Je crois que notre bilan en matière de peines minimales convient bien aux Canadiens», a estimé lundi le ministre Nicholson.

Mais Dan MacRury, un procureur de la Couronne de la Nouvelle-Écosse, a pour sa part soutenu que les magistrats n'ont parfois d'autres choix que d'incarcérer des personnes atteintes de maladie mentale, qui pourraient être plutôt confiées au réseau de la santé.

«C'est une inquiétude que nous avons et elle doit certainement être prise en compte», a affirmé M. MacRury.

L'association tente d'obtenir l'inclusion d'exceptions aux peines minimales pour des «dossiers exceptionnels», comme les personnes souffrant d'une maladie mentale ou de dommages permanents au cerveau. Selon les avocats, d'autres pays ont adopté de telles mesures d'exception, comme les États-Unis, l'Afrique du Sud, le Royaume-Uni et l'Australie.

M. MacRury a expliqué que l'Association du Barreau canadien va continuer à faire pression sur le gouvernement.

En conférence de presse à Québec lundi, le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu a réfuté les arguments selon lesquels la criminalité grave est en baisse au pays.

«Ce n'est pas parce que la criminalité baisse qu'il faut baisser nos bras au niveau des sentences. Est-ce que parce qu'on a 10 meurtres de moins au Canada cette année, on va faire en sorte qu'au lieu de donner une sentence à vie, on va leur donner 10 ans?

«Il y a des crimes graves auxquels il faut appliquer des sentences sévères. Il y a 20 pour cent des criminels qui commettent 70 pour cent des crimes: c'est à eux que nos projets de loi s'adressent», a indiqué le sénateur québécois, dont la fille a été assassinée.