La classe politique québécoise dénonce la nomination, par le premier ministre Stephen Harper, d'Angelo Persichilli à la fonction stratégique de directeur des communications.

M. Persichilli doit s'expliquer sur ses propos passés sur le Québec et M. Harper doit publiquement s'en dissocier, a réclamé vendredi le ministre des Affaires intergouvernementales, Pierre Moreau.

«Les propos sont inexacts. Ils sont inacceptables. L'un doit s'en expliquer, l'autre doit s'en dissocier», a tranché M. Moreau, en entrevue téléphonique.

L'opposition péquiste va plus loin, en demandant au premier ministre Harper de remettre en question la nomination de M. Persichilli.

«Il faut que M. Harper dise lui aussi que ce n'est pas acceptable et il doit reconsidérer son choix», a commenté le porte-parole péquiste en matière d'affaires intergouvernementales, le député Bernard Drainville, en entrevue téléphonique.

Il considère que cette nomination, qui illustre un «manque de respect», voire un «mépris» envers le Québec, n'est pas de nature à apaiser les relations Québec-Ottawa.

Le choix, par le premier ministre, de quelqu'un comme M. Persichilli pour exercer un rôle aussi influent sur la politique canadienne a donc créé un profond malaise au Québec, vendredi.

On reproche à l'ex-journaliste de ne pas parler un mot de français, mais surtout d'avoir tenu dans le passé des propos très critiques et mensongers sur le Québec.

Ancien chroniqueur au Toronto Star, au Hill Times et au Toronto Sun, M. Persichilli, qui entre en fonction la semaine prochaine, a déjà écrit qu'il y avait trop de francophones au Parlement et dans la fonction publique fédérale. Il a aussi dénoncé l'attitude, selon lui trop répandue à Ottawa et contre-productive, selon laquelle il convient de faire plaisir au Québec, une province qui aime bien se «plaindre», pour éviter la rupture du pays.

Son prédécesseur, Dimitri Soudas, était parfaitement bilingue et provenait du Québec.

De son côté, le député fédéral Roméo Saganash, élu sous la bannière du NPD en Abitibi le 2 mai dernier, conclut de cette nomination que le premier ministre Harper est prêt à se passer du Québec, pour punir les électeurs québécois de ne pas avoir voté pour lui lors des dernières élections générales.

En agissant de la sorte, M. Harper «a fait une croix sur le Québec», a commenté M. Saganash, lors d'un point de presse à Montréal.

Le gouvernement Charest ne partage cependant pas cette conclusion, sans pour autant entériner la nomination de M. Persichilli.

Car les chroniques passées du nouveau directeur des communications «traduisent une méconnaissance affligeante de la réalité», a poursuivi le ministre Pierre Moreau, qui se désole de voir ainsi quelqu'un occupant une telle fonction véhiculer au Canada une fausse image du Québec.

«C'est blessant pour le Québec», selon lui.

Devant le tollé soulevé par cette nomination, l'adjoint de M. Persichilli, Andrew MacDougall, a tenté vendredi de calmer le jeu en disant, dans un bref communiqué, que le Québec demeurerait «au coeur de notre gouvernement».

Sauf que lorsque le nouveau directeur des communications aura à participer aux décisions du cabinet sur les droits des francophones ou sur la place du français au sein des institutions fédérales, «il risque d'avoir une influence très négative» sur le cours des choses, selon Bernard Drainville, convaincu que le premier ministre Harper envoie ainsi «un très mauvais signal aux francophones et aux Québécois en particulier».

Idéalement, M. Drainville souhaiterait donc que le Québec parle d'une seule voix dans ce dossier.

«Sur ces questions-là, tous les partis politiques devraient s'entendre pour faire front commun et demander la même chose», a-t-il fait valoir.