Le ministre Tony Clement a fait des pieds et des mains pour répondre aux demandes du maire de Huntsville, Claude Doughty, dans les mois qui ont précédé l'organisation du sommet du G8 en 2010, quitte à intervenir auprès du bureau du premier ministre Stephen Harper pour obtenir gain de cause.

C'est du moins ce que révèlent des échanges de courriels entre M. Clement, qui est président du Conseil du Trésor, et le maire Doughty entre 2008 et 2010. Le NPD a obtenu une centaine de pages de courriels échangés entre les deux hommes grâce à la Loi sur l'accès à l'information de l'Ontario.

À titre d'exemple, M. Clement a pris les moyens pour contrer les objections de la Police provinciale de l'Ontario (PPO) qui s'opposait à l'installation d'un centre des médias à Huntsville pour des raisons de sécurité.

Le chef de la Police provinciale de l'Ontario, Julian Fantino, qui est aujourd'hui ministre conservateur dans le gouvernement Harper, estimait qu'il fallait augmenter les mesures de sécurité à Huntsville et abandonner l'idée d'installer un centre pour les médias internationaux.

Le maire Doughty tenait toutefois à la présence des médias pour maximiser les retombées pour sa ville. «Merci, Claude. J'apprécie tes efforts. Nous formons une équipe. La bonne nouvelle: la colère du bureau du premier ministre envers la PPO ne fait qu'augmenter. Nous allons passer au travers de cela ensemble», écrit le ministre dans un courriel au maire daté du 10 février 2009.

Le ministre s'est aussi opposé à un examen des dépenses que voulait mener Infrastructure Canada relativement à la tenue du sommet du G8 à Huntsville. Le maire Doughty avait exprimé ses craintes au ministre.

Dans un courriel envoyé à Tony Clement le 22 juin 2010, quelques jours avant la tenue du sommet, le maire de Huntsville écrit: «C'est totalement inacceptable. Je suis convaincu que tu es d'accord.» Le ministre lui a répondu le même jour: «Je suis d'accord. Je travaille là-dessus.»

Ces courriels risquent de plonger de nouveau le ministre Clement dans l'embarras. La semaine dernière, le NPD a révélé aux Communes que le ministre avait exhorté le maire de Huntsville à embaucher un de ses amis, Vern Freedlander, consultant, pour faire du travail en prévision de la tenue du sommet du G8.

Selon le NPD, ce geste du ministre confirme qu'il a utilisé la tenue de ce sommet pour se livrer à des activités de copinage. En août, le NPD a divulgué d'autres documents obtenus auprès des municipalités de la région de Muskoka qui, selon lui, démontraient que le ministre Clement avait utilisé de l'argent du Fonds d'infrastructure du G8 pour créer «une caisse occulte personnelle de 50 millions de dollars» afin de financer des projets proposés par les maires des municipalités sans avoir à rendre de comptes au Parlement.

Les projets financés étaient d'abord choisis par un petit groupe de maires lors de rencontres présidées par Clement. Selon le NPD, le groupe établissait ses propres critères de sélection des projets, dressait une liste des projets qui devaient être soumis pour approbation, puis les approuvait sans discussion. Qui plus est, les demandes de projet étaient traitées par le bureau de circonscription du ministre Clement.

En tout, 32 projets ont été financés. Certains projets, comme des abris de pique-nique (125 000 $), des jardinières en ciment (65 000 $) et une fontaine (178 000 $), provenaient de municipalités situées à plus de 60 km du lieu du sommet.

Le ministre Clement s'est abstenu de répondre directement aux accusations du NPD. D'autres ministres se sont levés à sa place à la Chambre des communes pour dire que l'argent des contribuables a été dépensé judicieusement dans le cadre de ce sommet et que le vérificateur général s'est déjà penché sur ce dossier.