Le Québec a une approche trop molle à l'égard du crime, a affirmé mercredi le sénateur conservateur Pierre-Hugues Boisvenu, qui estime que le ministre provincial de la Justice se trompe du tout au tout en attaquant le projet de loi fédéral qui durcirait les peines contre les jeunes contrevenants.

«Je pense que le Québec est soft on crime, a déclaré le sénateur en point de presse. On a une particularité au Québec, quand j'écoute le discours à peu près partout. Dès qu'on veut remettre en question des modèles, c'est très difficile de le faire.»

Le ministre québécois de la Justice, Jean-Marc Fournier, est revenu à la charge, cette semaine, contre le projet de loi conservateur C-10 sur la justice criminelle. Il souhaite que le gouvernement Harper l'amende afin de préserver le modèle québécois de réhabilitation des jeunes contrevenants.

Il y a deux semaines, devant un comité parlementaire, ce même ministre a prévenu que Québec refuserait de payer les coûts supplémentaires des nouvelles mesures, lesquelles risquent d'engorger les prisons provinciales.

«M. Fournier n'a pas pris connaissance de la portée du projet de loi C-10, notamment sur les jeunes contrevenants», a rétorqué mercredi le sénateur Boisvenu.

Il martèle que seulement 3% des jeunes contrevenants seront touchés par la nouvelle législation. Et encore, ce sera seulement ceux qui commettent les crimes les plus graves, notamment les meurtres et les agressions sexuelles.

«Démagogique» et «ridicule»

À Québec, le ministre Jean-Marc Fournier a qualifié de «démagogique» la sortie du sénateur. Il a une fois de plus mis au défi le gouvernement conservateur de produire une étude qui prouve la nécessité du projet de loi C-10.

«On a la science de notre côté», a-t-il affirmé.

La position du ministre provincial a trouvé des échos à la Chambre des communes, où le Nouveau Parti démocratique et le Parti libéral se sont prononcés pour les amendements qu'il propose. Le chef du Parti libéral, Bob Rae, a d'ailleurs qualifié de «ridicule» la sortie du sénateur Boisvenu.

«La question n'est pas d'être dur, doux ou mou. La question, c'est d'être intelligent, a-t-il affirmé. Le gouvernement a beaucoup d'idéologie, mais pas l'intelligence de voir et d'écouter l'expérience de ceux qui sont directement impliqués dans ce domaine.»

Le projet de loi omnibus C-10 regroupe plusieurs mesures que le gouvernement Harper n'a pu faire adopter lorsqu'il était minoritaire. Il prévoit des peines de prison plus sévères pour les mineurs et les trafiquants de drogue. On souhaite aussi rendre plus difficile le rapatriement de Canadiens emprisonnés à l'étranger.

Les relations sont pour le moins tendues entre les gouvernements Harper et Charest dans ce dossier. Le ministre Fournier a affirmé à La Presse qu'Ottawa ne lui a pas envoyé un accusé de réception de sa lettre envoyée mardi - une marque de politesse pourtant élémentaire. Il tente depuis plus d'un mois, en vain, de s'entretenir avec son homologue fédéral Rob Nicholson.