Le gouvernement Harper ne croit plus qu'il faut imposer une peine de prison à ceux qui veulent empêcher un citoyen de faire flotter le drapeau canadien où bon lui semble.

Devant la levée de boucliers que cette proposition a soulevée au Québec, au cours des dernières semaines, les stratèges conservateurs comptent radier cette clause pénale controversée du projet de loi privé déposé par le député conservateur ontarien John Carmichael, a appris La Presse.

Ces mêmes stratèges croyaient avoir réussi un bon coup, en septembre, lorsque le ministre du Patrimoine James Moore s'est présenté aux côtés du député John Carmichael pour donner son appui au projet de loi privé.

La présence du ministre Moore avait pour but d'illustrer le fait que le cabinet Harper appuyait sans réserve ce projet de loi. Mais les bonzes conservateurs se sont aperçus que cette manoeuvre visant à fouetter le patriotisme canadien risquait de provoquer une guerre des drapeaux.

Le projet de loi C-288 stipule notamment que «nul ne peut empêcher quiconque de déployer le drapeau national». Cette mesure interdirait donc au propriétaire d'un immeuble résidentiel d'exiger qu'un de ses locataires qui souhaite afficher ses couleurs patriotiques retire le drapeau canadien de son balcon.

Quiconque contreviendrait aux dispositions de ce projet de loi serait passible d'une amende et d'une peine d'emprisonnement maximale de deux ans. Ce faisant, le gouvernement Harper et le député John Carmichael souhaitaient répondre aux plaintes de citoyens qui ont été forcés dans le passé de retirer le drapeau canadien de leur fenêtre ou de leur balcon en raison de règlements d'immeuble.

Or, les stratèges conservateurs se sont fait dire sans ambages que leur manoeuvre risquait de se retourner contre le gouvernement Harper, déjà impopulaire au Québec en raison de ses décisions sur la monarchie, l'environnement, le registre des armes d'épaule et la nomination d'anglophones unilingues à des postes importants au sein de l'appareil de l'État.

Par exemple, des propriétaires d'appartement pourraient exhiber leur unifolié sur leur balcon le 1er juillet au Québec et dans l'ensemble du pays même si les clauses de propriété interdisent de le faire.

Mais les résidants de ces mêmes appartements n'auraient pas le droit d'afficher le drapeau du Québec sur le balcon le 24 juin, jour de la Fête nationale. Résultat: le drapeau du Canada obtiendrait un meilleur traitement que le fleurdelisé au Québec si ce projet de loi était adopté dans sa forme actuelle.

Joint hier, le député Carmichael a confirmé à La Presse qu'il souhaite amender son projet de loi privé lorsqu'il sera étudié par le comité du patrimoine, afin d'en soustraire les éléments controversés concernant les peines de prison.

«Nous avons eu beaucoup de suggestions de l'opposition, de même que de nos propres collègues du Québec et de gens partout au pays. J'ai constaté qu'il y avait beaucoup de résistance concernant les peines de prison. Nous allons rendre le projet de loi plus acceptable pour tout le monde une fois qu'il sera à l'étude au comité», a dit M. Carmichael.

«Mes collègues du Québec m'ont exprimé leurs préoccupations et ils m'ont fait certaines suggestions. Je veux donner le droit aux Canadiens d'afficher le drapeau, mais je ne veux pas mettre des gens derrière les barreaux à cause de cela», a-t-il ajouté.

Son projet de loi sera débattu en deuxième lecture pour une deuxième heure en fin de journée aujourd'hui, dernier jour de session parlementaire avant le congé des Fêtes. M. Carmichael aimerait que son projet de loi soit adopté avant la Fête du Canada le 1er juillet 2012.