Le premier ministre Stephen Harper écarte l'idée de déclencher des élections partielles dans les circonscriptions où les électeurs auraient été victimes d'appels frauduleux durant la dernière campagne électorale.

Aux Communes, lundi, le premier ministre a aussi mis au défi les partis de l'opposition, qui accusent le Parti conservateur d'avoir orchestré «la plus grande fraude électorale dans l'histoire du pays», de fournir les preuves qu'ils détiennent, s'ils en ont, à Élections Canada.

La controverse des appels automatisés a encore pris de l'ampleur. Les partis de l'opposition calculent que les électeurs d'une quarantaine de circonscriptions ont été ciblés par un stratagème téléphonique qui visait à dissuader leurs partisans de se rendre aux urnes. Au moins une firme impliquée dans le manège, RackNine, a été embauchée par des candidats conservateurs au dernier scrutin.

D'anciens employés d'une autre société, Responsive Marketing Group, ont affirmé au Toronto Star qu'ils avaient sciemment induit en erreur des électeurs lors des dernières élections. Cette firme, qui exploite des centres d'appels, a elle aussi été embauchée par des candidats conservateurs, dont 16 au Québec.

Faisant face à un flot de questions, M. Harper a de nouveau nié que son parti ait joué quelque rôle que ce soit dans cette affaire.

«Le Parti conservateur a nié et nie encore ces allégations», a affirmé M. Harper lundi, jour de reprise des travaux parlementaires. «Si le NPD a des informations, et je ne suis pas certain que c'est le cas, il doit donner ces informations à Élections Canada.»

Élections Canada enquête depuis des mois afin de débusquer les responsables des appels frauduleux. L'organisme est épaulé par la Gendarmerie royale du Canada.

Selon la chef intérimaire du Nouveau Parti démocratique (NPD), Nycole Turmel, la seule façon de restaurer la confiance des électeurs dans les circonscriptions visées par ces appels frauduleux est de déclencher des élections partielles - une option qu'a vite écartée le premier ministre.

Pour sa part, le chef intérimaire du Parti libéral, Bob Rae, a soutenu que le Parti conservateur doit montrer patte blanche dans cette affaire d'autant plus qu'il a conclu des ententes avec certaines firmes à l'origine de ces appels frauduleux.

«Le Parti conservateur détient de l'information pertinente. C'est le Parti conservateur qui sait combien d'argent a été dépensé pour cela, quels contrats ont été signés, quelles instructions ont été données à ceux qui appelaient, quelles informations ont été fournies. Cette responsabilité, elle appartient à ceux qui siègent en face», a lancé M. Rae.

Dans son rapport au Parlement sur les dernières élections, déposé en août dernier, le directeur général d'Élections Canada, Marc Mayrand, avait indiqué que le commissaire aux élections fédérales, William Corbett, avait ouvert une enquête relativement à «des appels malveillants incitant les électeurs à s'abstenir de voter ou à ne pas voter pour un parti en particulier ou les informant faussement d'un changement d'adresse de leur lieu de scrutin».

En fin de semaine, le député conservateur de Peterborough, Dean Del Mastro, a affirmé avoir aussi été victime d'appels frauduleux durant la dernière campagne électorale et il a invité Élections Canada à élargir son enquête.

«Le Parti conservateur presse toute personne détenant de l'information sur des appels de harcèlement ou des appels donnant de l'information erronée sur les bureaux de scrutin de transmettre immédiatement cette information à Élections Canada. Ma propre campagne dans Peterborough a été victime d'appels douteux, des partisans conservateurs étant harcelés tard le soir par des appels abusifs, et notre parti condamne ces actes», a-t-il dit.

La chef du Parti vert, Elizabeth May, a fait savoir qu'elle avait également été victime de ces «tactiques de répression du vote» dans sa circonscription de Saanich-Gulf Islands, en Colombie-Britannique, aux scrutins de 2011 et de 2008. Le stratagème était le même: des électeurs de sa circonscription étaient informés que leur bureau de vote avait déménagé, et ils étaient faussement redirigés vers une autre adresse.

Aux Communes, le chef intérimaire du Parti libéral, Bob Rae, a exigé la tenue d'un débat d'urgence sur cette affaire, estimant que la démocratie canadienne est affaiblie par ces manoeuvres douteuses. Mais le président Andrew Scheer, a rejeté sa demande.