Les menaces proférées par Anonymous à l'égard du ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, constituent une atteinte à ses privilèges parlementaires, estime le président de la Chambre des communes, Andrew Scheer.

Dans une décision rendue mardi matin, M. Scheer a décrété que les messages du groupe de pirates informatiques militants contenaient «effectivement des menaces directes dirigées contre le ministre en particulier, mais aussi contre l'ensemble des députés».

«Ces menaces démontrent un mépris flagrant pour nos traditions et se veulent une attaque subversive contre les privilèges les plus fondamentaux de la Chambre», a conclu le président.

Le dossier sera maintenant renvoyé à un comité parlementaire, qui fera rapport à la Chambre des communes après l'avoir étudié.

Anonymous a diffusé une série de vidéos sur le site YouTube les 18, 22, 25 février et 1er mars, en réaction au projet de loi C-30. Ce projet vise à donner aux forces de l'ordre (gouvernement, services policiers, services du renseignement) le pouvoir d'obtenir sans mandat des informations personnelles sur des internautes.

Le dépôt du projet de loi a provoqué de vives réactions de la part de divers groupes, notamment des partisans traditionnels du Parti conservateur, et des partis de l'opposition. Plusieurs craignent que C-30 n'ouvre la porte à l'intrusion abusive de l'État canadien dans la vie privée des citoyens.

Renseignements gênants

Anonymous avait lancé un ultimatum au ministre de la Sécurité publique: abandonner C-30 ou faire face à la divulgation de renseignements potentiellement gênants le concernant. Le gouvernement n'a pas bougé. Le groupe qui se pose en défenseur des libertés individuelles sur le web a donc mis sa menace à exécution le 24 février. Dans une vidéo mise en ligne sur YouTube, il a allégué que M. Toews avait fait nommer l'une de ses maîtresses juge à une cour manitobaine en 2006, lorsqu'il était ministre fédéral de la Justice.

Au moment où la campagne d'Anonymous débutait, un employé du Parti libéral, Adam Carroll, a lui aussi lancé sa propre initiative, en créant un compte Twitter, Vikileaks30, par lequel il a diffusé sur une série de renseignements personnels sur Vic Toews, dont des détails concernant son divorce et ses aventures extraconjugales.

Le président de la Chambre a refusé mardi de considérer Vikileaks30 comme une atteinte au privilège parlementaire du ministre Toews. Il a évoqué les excuses du chef libéral intérimaire, Bob Rae, pour expliquer sa décision.

On pourrait donc attendre quelques semaines avant le dépôt du rapport d'un comité parlementaire, qui nous permettra d'en savoir davantage sur les conséquences de la décision de mardi. À noter que les atteintes au privilège parlementaire ne donnent pas nécessairement lieu à des sanctions concrètes très graves pour ceux qui en sont reconnus coupables. Elles sont néanmoins porteuses d'une charge symbolique importante dans le cadre des activités démocratiques et parlementaires canadiennes.