Nouveau chef national du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair a reçu un coup de fil inattendu dimanche matin. Jean Charest lui téléphonait pour le féliciter. Banale en apparence, la démarche reste étonnante pour ceux qui avaient assisté à la collision frontale, des deux politiciens «irlandais» il y a cinq ans.

Les deux hommes s'étaient quelques fois rencontrés depuis l'élection de M. Mulcair comme député néo-démocrate d'Outremont en 2007, sitôt nommé lieutenant québécois par le regretté Jack Layton. Il y a quelques mois encore, M. Mulcair a rencontré M. Charest à son bureau de Québec, «ils avaient fait le point sur les dossiers québécois», d'indiquer lundi Hugo D'Amours, le porte-parole de M. Charest. Lors du coup de fil «cordial» de dimanche, «ils ont convenu de se revoir bientôt pour refaire le point», a ajouté M.D'Amours.

Depuis la rupture percutante de 2007, «ils se sont revus à quelques reprises et ont travaillé ensemble depuis ce temps», observe-t-il. Ils se sont vus aussi fréquemment dans des événements publics à Montréal.

En février 2006, Thomas Mulcair avait été éjecté du gouvernement Charest comme ministre de l'Environnement. Il avait lui-même expliqué, l'an dernier, qu'il avait été limogé à cause d'un litige sur le développement de milieux humides à Laval. «C'est là que ç'a commencé à mal aller avec Jean Charest. Il y avait beaucoup de terrains en jeu à Laval, notamment, et Charest m'a dit qu'il ne pouvait pas faire ça au maire Gilles Vaillancourt. On avait trop besoin de lui pour les élections», avait expliqué M. Mulcair à L'actualité. Les terrains, des milieux humides, avaient été ouverts en 2008, au développement résidentiel à Laval. Le domaine Islemère, «c'est proprement scandaleux», avait publiquement dit M. Mulcair.

Mais le ministre Mulcair s'était surtout opposé à la vente du mont Orford, un parc provincial, à un développeur privé proche des libéraux de Sherbrooke. Le cabinet du premier ministre avait directement ordonné à la sous-ministre de l'Environnement qu'on prépare un mémoire en ce sens pour le conseil des ministres, passant par-dessus la tête du bouillant député de Chomedey. Le projet de privatisation n'a jamais abouti. Début 2007, avec une perspective d'élections générales au printemps, des stratèges libéraux avaient fait pression pour convaincre M. Mulcair de ne pas se représenter dans Chomedey, pour céder la place à Guy Ouellette un policier à la retraite de la SQ, bien connu à l'époque comme commentateur à la télévision. M. Mulcair, qui tenait à se représenter pour le PLQ, avait fini par déclarer forfait.

En entrevue à Radio Canada, M. Mulcair a souligné que «M. Layton m'avait confié pour tâche immédiate, quand on était devenu l'opposition officielle le 2 mai dernier, d'aller à Québec pour avoir une bonne relation avec le gouvernement du Québec. On a eu une excellente rencontre».

Thomas Mulcair a aussi eu des contacts réguliers avec le ministre des Finances, Raymond Bachand, dans le dossier de l'harmonisation de la TVQ et de la TPS, réglé l'an dernier. M. Mulcair a souligné s'être entretenu dimanche avec M. Charest mais aussi avec son ex-collègue libéral, Pierre Paradis, qui lui aussi s'était opposé à la privatisation du Mont Orford, en 2007.