Le premier ministre Jean Charest est en bonne partie responsable du départ de Monique Jérôme-Forget, estime la chef péquiste Pauline Marois. Il s'en est servi comme «paratonnerre» et lui a laissé porter le fardeau des décisions difficiles et controversées, comme l'annonce d'un déficit budgétaire.

«Pendant un certain temps», entre autres durant la controverse entourant la Caisse de dépôt et placement, «on ne voyait pas Jean Charest, et c'est Monique Jérôme-Forget qui allait au front». M. Charest a en quelque sorte «laissé tomber» sa ministre au cours des derniers mois.

Selon elle, c'est «un gros morceau qui part», «une figure importante», ce qui est «inquiétant pour le gouvernement», surtout en pleine crise économique. M. Charest n'a pas su la «retenir» alors que «la situation est particulièrement difficile». 

«C'est une femme que j'aimais beaucoup, que j'admirais, même si on avait des points de vue différents», a dit Mme Marois, qui salue le règlement de l'équité salariale dans le secteur public et parapublic intervenu grâce à Mme Jérôme-Forget. «Elle a défendu avec vigueur et fermeté les idées auxquelles elle croyait».

Toutefois, «les derniers mois ont terni son image», «elle a perdu une certaine crédibilité», noté Mme Marois. «On aurait souhaité plus de transparence sur la Caisse de dépôt et le déficit budgétaire.» Elle accuse toutefois Jean Charest d'avoir «une grande part de responsabilité» dans son départ. La première partie de son mandat comme ministre a été selon elle «plus lumineuse».

La chef péquiste souligne que Mme Jérôme-Forget était capable «d'être ferme, de tenir tête à certains collègues».

Selon elle, la ministre a dû se présenter aux dernières élections à contrecoeur, «parce que Jean Charest le voulait».

De son côté, le député adéquiste François Bonnardel, estime que Monique Jérôme-Forget, «malheureusement, quitte la vie politique sur un échec». «C'est dommage parce que la Caisse de dépôt, l'explosion de la dette, une réingénierie de l'État qui n'a jamais existée, c'est le constat aujourd'hui qu'on doit donner à la ministre des Finances», a affirmé le critique en matière de finances.

«Aujourd'hui, le premier ministre devient imputable des problèmes de la caisse, du dernier budget déficitaire de son gouvernement. Le premier ministre a emmené Monique Jérôme-Forget dans des pièges successifs, et aujourd'hui, le premier ministre perd son principal bouclier», a-t-il ajouté. Selon lui, «il faut croire que Monique Jérôme-Forget en avait assez de donner, d'être un bouclier».

Même s'il dit que la ministre «quitte sur un échec», François Bonnardel croit que son départ est «une perte pour le Québec». «C'est une grande dame qui quitte la politique, une femme de rigueur, une femme déterminée, une adversaire politique à qui on voue énormément de respect. C'était la crédibilité du gouvernement». Les quatre derniers mois ont toutefois miné sa crédibilité selon lui.

Pour le député de Québec solidaire, Amir Khadir, le départ de Monique Jérôme-Forget «est peut-être une bonne nouvelle pour le Québec». «Elle a un héritage globalement très négatif. La dame était très sympathique, affectueuse personnellement. Mais ses décisions ont eu des conséquences comme l'appauvrissement des démunis, des baisses d'impôts qui ont largement bénéficié aux plus nantis, et mis les deniers publics à sec».

«Pour le Québec, (son départ) est quand même bon», puisque la ministre faisait la promotion des PPP, une «vieille recette» selon lui. «Son héritage, ce sont les PPP, qui sont très durement critiqués dans le domaine de la santé», avec le CHUM.

«Monique Jérôme-Forget n'était plus la femme de la situation. Elle s'est toujours plu à se définir comme thatchérienne. Mais cette vision de l'économie et de la société est largement un échec».

M. Khadir salue toutefois le courage de Monique Jérôme-Forget qui a défendu des décisions controversées alors qu'»on ne voyait pas Jean Charest». Sa démission «est un ultime sacrifice pour sauver un tant soit peu son gouvernement qui sent un peu la fin de régime».