Aux premières loges quand l'Action démocratique du Québec était devenue opposition officielle, Gilles Taillon envisage sérieusement de briguer la succession de Mario Dumont.

L'ancien président du Conseil du patronat avait déjà pris tout le monde de court quand il avait sauté dans le bateau adéquiste à l'automne 2006. Selon les informations réunies par La Presse, il est presque au terme d'une série de consultations qui l'inciteront à annoncer, d'ici une semaine environ, qu'il sera de la course à la direction de son parti. Le principal intéressé se refuse à commenter. Mais dans son entourage, des collaborateurs qui ont travaillé près de lui aux élections de décembre dernier assurent qu'il a obtenu des appuis dans le caucus des députés. On parie sur François Bonnardel, le député de Shefford, qui laisse planer son nom depuis le départ de Mario Dumont, mais qui semble maintenant moins tenté par l'idée de se lancer dans la course.

Gilles Taillon avait tenté de faire le saut avec le PLQ et Jean Charest en 1998, quand il dirigeait le Conseil du patronat. Il avait finalement plongé en politique à sa retraite, une décision qui avait surpris tout le monde à l'époque. Avant le débat sur les accommodements raisonnables, l'ADQ traînait la patte dans les sondages.

Il avait été élu en 2007 dans Chauveau, près de Québec, une circonscription fertile pour l'ADQ. Mario Dumont l'avait choisi comme critique aux Finances - il était perçu comme un «loner» chez ses collègues du caucus. «Il est en réflexion active. Il reste quelques consultations à faire», a expliqué l'un de ses supporters. Des anciens députés adéquistes défaits en 2008 et des employés politiques du parti seraient prêts à l'appuyer publiquement. M. Taillon devrait renoncer à son contrat qui fait de lui un conseiller à temps partiel auprès de la chef par intérim, Sylvie Roy.

Étonnamment, il avait opté pour l'Outaouais, où se trouve sa famille, pour la récente campagne électorale. Dans la circonscription de Chapleau, ses chances d'être élu étaient infimes. Il s'est fait battre par le Parti libéral le 8 décembre dernier.

M. Taillon sautera dans une course qui risque d'être mouvante. La décision de repousser à février 2010 le congrès de direction du parti avait été chaudement discutée. Les partisans d'un scénario plus rapide reviendront à la charge.

Au conseil général de l'ADQ, les 30 et 31 mai, un groupe de militants déposera une proposition pour devancer l'élection du nouveau chef à l'automne, ont confirmé plusieurs sources. Le conseil général sera l'occasion de confirmer les règles de la course.

Lorsqu'il a annoncé sa candidature à la direction du parti, le 24 mars, Éric Caire avait critiqué les règles du jeu que venait d'adopter le comité exécutif du parti. L'élection du chef au début de février - dans 10 mois - est «un peu tard», avait dit le député de La Peltrie. Il souhaitait une campagne plus courte, un vote dès l'automne.

Au moment du dévoilement des règles, la chef intérimaire, Sylvie Roy, avait indiqué que «ce n'était pas pertinent» de tenir une élection à la direction à l'automne alors que se tiennent, en novembre, les scrutins municipaux. Et une course à la direction lancée en été, «avec les BBQ et les voyages», était mal avisée selon elle.

L'entrée en piste de Gilles Taillon soulèverait un peu plus d'intérêt autour de la campagne adéquiste. Éric Caire était seul en piste jusqu'à ce que Christian Lévesque, ex-député de Lévis, confirme à La Presse cette semaine qu'il sera lui aussi de la course. Il fera une annonce officielle en juin seulement, après le conseil général. Il a dû se défendre d'avoir recruté à titre de conseiller l'ancien directeur général du Parti québécois et bras droit de Bernard Landry, Raymond Bréard, éclaboussé par une affaire de lobbyisme en 2002.

En dépit de l'appel du pied de nombreux militants, Marc-André Gravel, avocat associé à l'ADQ depuis longtemps, ne sera pas de la course, indiquent des sources sûres.

Éric Caire a fait savoir qu'il comptait sur Pierre Brien, un des conseillers de Mario Dumont, comme organisateur de campagne. Or, joint hier dans sa région, l'Abitibi, M. Brien a indiqué qu'il n'avait pas l'intention de retoucher à la politique de sitôt. «J'ai pu donner mes opinions sur quelques sujets à Éric quand il se préparait à se lancer, mais je travaille actuellement à des mandats touchant les autochtones et Hydro-Québec dans le Nord, et je n'ai absolument pas la disponibilité nécessaire pour m'occuper d'une course à la direction du parti», a expliqué l'ancien député bloquiste.

En entrevue à La Presse mercredi, Éric Caire affirmait pourtant que M. Brien faisait partie de son équipe. «J'ai beaucoup de collaborateurs autour de moi, et je pense à Pierre Brien qui organise ma campagne. Ce n'est pas le dernier venu en politique!» avait-il lancé, vantant la qualité de son entourage.