Le premier ministre Jean Charest ne s'en cache pas: il fera tout ce qu'il peut pour éviter de rouvrir le débat explosif sur l'avortement.

Il s'est donc appliqué, mercredi, à mettre le couvercle sur la marmite, en s'engageant à respecter scrupuleusement le droit des femmes d'interrompre une grossesse non désirée.

«On l'a fait ce débat. C'est réglé. On ne reviendra pas là-dessus. Les femmes doivent avoir accès à ce service», a martelé à maintes reprises le premier ministre Charest, mercredi, en point de presse, en pesant chacun de ses mots.

Le ministre de la Santé, Yves Bolduc, qui a mis le gouvernement dans l'embarras dans ce dossier, a donc reçu le mandat de revoir à la baisse les critères définis par règlement dans la loi 34, de manière à ce que les cliniques privées puissent continuer à pratiquer des avortements comme avant.

Adoptée au printemps, la loi 34 vient encadrer la pratique des cliniques médicales privées - quant à la stérilité des instruments, par exemple, et la qualité de l'aération - , dans le but de garantir la qualité des soins qui y sont dispensés.

Or, en ce qui touche les cliniques où on pratique les interruptions de grossesse, le Collège des médecins estime que Québec place la barre beaucoup trop haut dans ses exigences quant aux normes à respecter, compromettant ainsi l'accessibilité au service.

Le week-end dernier, le ministre Bolduc avait refusé d'assouplir sa position, mais depuis a fait volte-face pour demander au Collège des médecins de lui fournir, dans les prochains jours, une nouvelle liste d'exigences mieux adaptée aux besoins réels des cliniques d'avortement.

«Maintenant il s'agit de s'assurer que le service sera livré et il le sera», a ajouté M. Charest.

Mais ni le ministre Bolduc ni le premier ministre Charest ne pouvait, mercredi, expliquer comment le gouvernement avait pu se retrouver au coeur d'un cafouillage qui a pris des proportions telles que certaines cliniques menacent de ne plus pratiquer d'avortements, voire de fermer leurs portes, tandis que la Fédération des médecins spécialistes réclame la tête du ministre.

Visiblement contrarié par la polémique autour de cette question qui soulève les passions, M. Charest a tout de même réaffirmé sa confiance «totale» au ministre Bolduc, mercredi, en marge de l'assermentation des députés libéraux Clément Gignac et Jean D'Amour, récemment élus.

De son côté, le ministre Bolduc n'a pu justifier pourquoi l'interruption volontaire de grossesse faisait partie de la liste des chirurgies et services visés par la loi 34.

Il a plaidé que la liste avait été dressée avant son arrivée à la tête du ministère, il y a un peu plus d'un an.

«C'est un ajustement qu'on doit faire. Il y a certaines choses trop exigeantes pour les cliniques d'avortement», a-t-il convenu, en point de presse, à sa sortie de la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. Il a rejeté la faute sur les «experts» qui ont préparé le projet de loi.

Quant à elle, la ministre responsable de la Condition féminine, Christine St-Pierre, a dit avoir obtenu de son collègue de la Santé l'assurance «que l'accessibilité à l'avortement est quelque chose de garanti», et que le service serait offert dans les délais prescrits.

Le ministre Bolduc croit pouvoir régler le dossier la semaine prochaine, quand il aura obtenu les recommandations du Collège des médecins.