Les contribuables québécois doivent se préparer au pire. Quand il observe ce qui se passe dans le reste du Canada, le gouvernement Charest estime qu'il lui manque 15 milliards de dollars de recettes venues des tarifs des services aux citoyens.

Les mises en garde nombreuses et récentes de Jean Charest quant à une hausse importante de ces tarifs ne sont pas que de vagues intentions: Québec a déjà mis en marche son opération en ce sens.Un «projet de loi sur le financement des services publics» circule déjà parmi les sous-ministres depuis la semaine dernière, a appris La Presse. Lors de la dernière réunion du conseil des ministres, les membres du gouvernement ont aussi reçu l'ambitieux plan de Québec en matière de tarification. Tous ont le mandat de revenir avec leur proposition à temps pour la réunion du 21 octobre, y compris un inventaire complet des tarifs relevant de leurs ministères et organismes.

Dans le mémoire qui accompagne le projet de loi, le gouvernement souligne que l'ensemble des tarifs actuellement appliqués rapporte 21 milliards de dollars annuellement. C'est 60% de la moyenne des provinces - il faudrait théoriquement atteindre 36 milliards, soit 15 milliards de plus qu'actuellement, pour rejoindre cette moyenne.

Le document d'une trentaine de pages insiste sur le fait qu'il faudra prévoir des mesures d'atténuation pour les ménages à bas revenus. Aussi, pas question de toucher au tarif des garderies à 7$ par jour.

On fait grand cas en revanche de la nécessité d'obtenir des compagnies minières des royautés «au prix du marché». Un rapport embarrassant du vérificateur général, l'an dernier, avait critiqué le fait que ces multinationales ne paient aucune redevance à Québec.

Les droits seront aussi attendus des forestières ainsi que des compagnies qui captent l'eau pour la revendre.

Hausse et indexation

Le projet de loi d'une cinquantaine d'articles - dont une quinzaine ne font que prévoir les ajustements à d'autres lois - indique que l'ensemble des tarifs appliqués par le gouvernement devront être ajustés pour tenir compte de la valeur réelle des services. Ils devront aussi être désormais indexés annuellement. Le problème de la non-indexation a été maintes fois soulevé, d'abord par le rapport de l'économiste Claude Montmarquette, qui, au printemps 2008, avait préconisé une hausse générale des tarifs gouvernementaux.

L'économiste proposait la fin de la «culture de la gratuité» et de la «sous-tarification» des services publics et l'application du principe de «l'utilisateur-payeur». Il recommandait même une hausse importante des tarifs d'électricité et des droits de scolarité, l'installation de compteurs d'eau et l'instauration du péage aux entrées de l'île de Montréal.

Après les dernières élections, la ministre des Finances Monique Jérôme-Forget avait joint à son budget un document proposant une large réflexion sur la tarification au Québec. Elle y relevait que, dans bien des cas, les tarifs des services aux citoyens - des permis de pêche aux certificats de naissance - étaient inchangés depuis des années. On peut souvent remonter à 1996 pour trouver la dernière augmentation, avait fait valoir Mme Jérôme-Forget. «Il est temps de bouger» avait-elle soutenu. Son document de réflexion est d'ailleurs mis en référence avec le mémoire de la semaine dernière.