Après avoir soutenu lundi que son gouvernement n'avait pas de plan dans sa manche pour une hausse générale des tarifs, le premier ministre Charest a battu en retraite hier.

Le plan de match révélé par La Presse existe; il était même prévisible, à partir d'un document qu'avait joint Monique Jérôme-Forget à son dernier budget, soutient maintenant M. Charest.

Au surplus, La Presse a finalement mis la main sur le projet de loi préparé par le ministère de la Justice pour le compte du ministère des Finances; avec un mémoire du ministre des Finances Raymond Bachand, le document doit être inscrit à l'ordre du jour du Conseil des ministres, le 7 octobre. Choisissant ses mots lundi, M. Charest avait soutenu qu'il n'y avait «rien de déposé au Conseil des ministres». Pour l'instant, fallait-il comprendre.

Hier, à l'Assemblée nationale, la chef péquiste Pauline Marois a relevé les contradictions dans les déclarations de M. Charest quant à ses intentions. Jusqu'ici, le premier ministre avait opposé un démenti formel aux informations publiées. Pour lui, lundi, la «consultation» pré-budgétaire était le seul élément sur le tableau du gouvernement avant de prendre des décisions sur le financement des services publics.

Relevant l'existence du plan de match confidentiel, Mme Marois lui a lancé: «Peut-on dire aux contribuables, aux chefs d'entreprise, aux travailleurs, pourquoi ils devraient participer à une consultation dont les conclusions sont écrites à l'avance?»

Le péquiste Jean-Martin Aussant lui a demandé s'il avait bel et bien préparé un mémoire pour ses collègues; Raymond Bachand a répondu: «Il est normal que le ministre travaille sur toutes les hypothèses pour mettre en ordre ses politiques.»

Des tarifs nouveaux dans le collimateur

Or, son mémoire de la semaine dernière va bien au-delà des «hypothèses». M. Bachand y ouvre même une nouvelle porte. Dans la partie «confidentielle» non accessible au public, il souligne que la politique, en plus de l'indexation générale, devra déterminer les coûts des services tarifés «ou pouvant l'être». Certains services, jusqu'ici offerts gratuitement par Québec, pourraient donc basculer du côté des activités pour lesquelles Québec exigera d'être rétribué, voire remboursé, puisqu'on parle en même temps «d'autofinancement».

Au cabinet de M. Bachand, on souligne qu'avec son budget, Mme Jérôme-Forget avait déposé un document sur le financement des services publics qui prévoyait explicitement «un cadre législatif... et un projet de loi (qui) sera déposé à l'Assemblée nationale en 2009».

Dans les notes explicatives du Projet de loi sur le financement des services publics, qui comporte 50 articles, on précise qu'à compter de janvier prochain, les organismes publics auront à constituer un «registre des tarifs» et à déterminer le coût de la «prestation» (du service) qu'ils doivent offrir aux citoyens. Une fois adopté, le projet de loi «instaure l'obligation» aux organismes de «réviser ces tarifs au moins tous les cinq ans et prévoit leur indexation annuelle». Après avoir évalué le coût réel des services qu'ils offrent, les organismes devront se fixer des cibles «d'autofinancement». Pour les démunis, la loi prévoit des «mesures compensatoires» pour maintenir l'accès aux prestations tarifées.

Le dernier article prévoit que le tout devra s'appliquer à compter du 1er janvier prochain, sauf l'article 22, qui contient les dispositions sur l'indexation automatique des tarifs; il entrerait en vigueur en janvier 2011.