Le premier ministre Charest a administré dimanche une douche froide à ses militants qui proposaient une longue liste de tarifications nouvelles pour équilibrer les finances de l'État.

Majorer les tarifs n'est pas une panacée aux problèmes du gouvernement. Dans les prochaines années, l'État devra surtout «se serrer la ceinture», a insisté hier M. Charest.

«Le gouvernement n'a jamais affirmé qu'il allait adopter ce que les membres proposaient», a résumé M. Charest en point de presse, à l'issue du conseil général de son parti. «Je suis chef du PLQ, mais je suis le premier ministre de tous les Québécois» a-t-il expliqué, se défendant bien d'ainsi «désavouer» ses militants, qui ont, en fin de semaine, «contribué au débat».

Les résolutions adoptées par le PLQ doivent «être examinées dans un contexte plus large», qui déborde les seules augmentations de tarifs. Il faut le «tableau d'ensemble» qu'est susceptible d'apporter au gouvernement la «consultation prébudgétaire élargie» qui est en préparation.

Pendant deux jours, les 400 délégués avaient pourtant studieusement discuté, amendé et adopté une série de propositions ouvrant la voie à de nouveaux tarifs, ce qui suppose des décisions impopulaires de la part du gouvernement. Le PLQ est désormais en faveur de la généralisation des péages sur toutes les routes de la province, de la hausse des tarifs de l'électricité domestique et même de l'imposition de droits de scolarité au collégial.

Dans son allocution de clôture, M. Charest n'a pas même évoqué les propositions de son parti sur les tarifs. Il a souligné que, dans l'évaluation des moyens de réduire le déficit, il faut se garder «d'avoir une approche idéologique».

Pour réduire le déficit - on prévoit un total de 11,6 milliards en quatre ans -, le gouvernement compte «se serrer la ceinture», a promis M. Charest, qui dit «garder les yeux sur la colonne des dépenses». «Nous allons resserrer nos dépenses en protégeant les services. Les nouvelles initiatives gouvernementales seront forcément limitées» a-t-il lancé devant les militants.

Comme prévu, les dépenses de programmes augmenteront de 4,5% cette année par rapport à l'année dernière, une décision qui visait à atténuer l'impact du ralentissement économique. L'an prochain, ramener à 3,2% la croissance des dépenses est un défi colossal, a insisté M. Charest. Au surplus, la veille, l'économiste Luc Godbout était venu dire aux militants libéraux qu'il vaudrait bien mieux viser 2,8%.

M. Charest s'est engagé à ne pas hausser les impôts. «Dans un monde idéal», l'impôt reste le moyen le plus progressif d'augmenter les revenus de l'État, «mais on est dans le Canada, à côté des États-Unis», de souligner M. Charest. Une hausse inconsidérée des impôts risque de susciter des départs.

Des échanges vigoureux

Les débats du conseil général ont donné le feu vert au gouvernement pour faire adopter une «loi-cadre sur la tarification», qui permettra d'arrimer les tarifs à un pourcentage du coût réel des services. Dans le même esprit, le conseil national a approuvé rapidement le principe «d'ajuster progressivement des tarifs d'électricité afin qu'ils reflètent les coûts de production».

Si bien des propositions ont passé comme une lettre à la poste, les délégués ont mis du temps à approuver une résolution controversée proposant la mise en place d'un «système de péages sur les infrastructures autoroutières interurbaines». Pour plusieurs, cette mesure risque de mettre un frein au développement régional. «Cette nouvelle taxe pour les entreprises en région est contraire à nos engagements», a lancé Alain Maheux, de Beauce-Nord. Dans bien des régions, il n'y a pas d'autre solution que l'automobile; les transports en commun sont insuffisants, souvent même inexistants, a fait valoir un délégué de Vaudreuil-Soulanges.

Mais pour les jeunes du PLQ, cosignataires de la résolution, le principe de l'utilisateur-payeur va dans le sens de l'équité. «J'utilise les transports en commun et je subventionne par mes impôts des routes qui ne me servent pas», a expliqué Julien Gagnon, le président de l'aile jeunesse du PLQ.

Redevance sur l'eau

Les délégués ont aussi demandé au gouvernement d'instaurer «le plus rapidement possible» une redevance sur l'eau embouteillée, une idée qu'approuve la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp.

On veut aussi que Québec établisse un seuil pour les droits miniers que devront lui verser les exploitations dont les profits dépassent 500 000$.

On a également voté pour que le gouvernement Charest hausse ses droits sur les boissons alcoolisées et adopte une nouvelle taxe d'accise sur les aliments qui nuisent à la santé, comme les croustilles, les confiseries et les boissons gazeuses.

Samedi, le conseil général avait adopté, de justesse, une proposition qui prévoit la mise en place de droits de scolarité «modestes» au collégial. Une proposition de laquelle Jean Charest a clairement pris ses distances.

Sans dire qu'il s'oppose à ces droits, il a souligné que le gouvernement «ne voudrait rien faire qui réduise l'accessibilité des études postsecondaires». La résolution a été adoptée par une dizaine de voix seulement, ce qui montre, selon lui, «qu'il n'y a pas de bonne ou de mauvaise réponse à cette question».