Le ministre Claude Béchard a décidé d'augmenter les fonds publics versés aux partis politiques provinciaux, mais pas aux formations municipales de Montréal, là où les allégations de financement occulte ont fait scandale. Cette omission dans le projet de loi 78 a causé la surprise au sein de l'administration Tremblay et au parti de Louise Harel, a appris La Presse.

Le 25 novembre, lors du dépôt de son projet de loi, Claude Béchard a déclaré: «Il est impératif de diminuer la dépendance des partis politiques au financement privé afin de préserver la confiance des citoyens dans nos institutions et nos lois.»

 

L'administration Tremblay avait compris que les partis montréalais allaient profiter eux aussi d'une hausse du financement public. Le maire a même salué la décision du gouvernement dans un communiqué de presse le 25 novembre.

Or, le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques a augmenté le financement des seuls partis provinciaux. Ce sont pourtant les allégations de financement occulte à Montréal, lors de la campagne électorale, qui l'avaient poussé à déposer un projet de loi.

Claude Béchard modifie notamment la loi électorale afin d'augmenter l'allocation que le Directeur général des élections verse chaque année aux partis provinciaux. Cette allocation, actuellement de 0,50$ par électeur, passerait à 0,82$, une hausse de 64%. L'enveloppe totale s'élèverait à environ 4,7 millions par année, plutôt que 2,8 millions. La somme est distribuée aux partis au prorata des votes obtenus aux élections générales.

«Notre volonté, c'est de diminuer la pression sur le financement populaire des partis politiques et d'avoir un financement davantage public», avait dit Claude Béchard.

Le ministre n'applique pas le même principe au municipal. Pourtant, la Loi sur les cités et villes permet depuis des années aux partis politiques de Montréal et de Québec de bénéficier d'un financement public semblable à celui des partis provinciaux.

L'article 474.0.4 prévoit, pour Montréal et Québec seulement, le versement d'une «allocation destinée au remboursement des dépenses faites pour l'administration courante de tout parti autorisé, pour la diffusion du programme politique de ce parti et pour la coordination de l'action politique de ses membres». C'est la même formulation que dans la loi électorale concernant les partis provinciaux. Cette allocation est de 0,35$ par électeur. Les partis se partagent l'enveloppe en fonction des votes obtenus aux élections.

Contrairement au provincial, et c'est là la seule différence, l'allocation est puisée à même les budgets des villes de Montréal et de Québec, et le DGE ne la gère pas.

Pour 2010, 385 000$ seront alloués aux partis politiques de Montréal (0,35$ multiplié par 1,1 million d'électeurs), a-t-on confirmé à la trésorerie de la métropole. En tenant compte des résultats des élections du 1er novembre, Union Montréal, le parti du maire Gérard Tremblay, pourra toucher tout près de 154 000$; Vision Montréal (Louise Harel), 120 000$; Projet Montréal (Richard Bergeron), 97 000$.

Claude Béchard n'a jamais envisagé de hausser le financement public des partis municipaux, a affirmé son attaché de presse, Pascal D'Astous. Il n'a pas étudié non plus l'idée de modifier les dispositions de la Loi sur les cités et villes.

Demande de correction

L'administration Tremblay était persuadée du contraire. «Notre compréhension de ce dossier était que la hausse des fonds publics s'appliquait aussi à nous», a affirmé Martin Tremblay, l'attaché de presse du maire. La Ville demandera au ministre de corriger son omission, d'autant plus que Gérald Tremblay a déjà plaidé pour une augmentation du financement public.

«Le ministre a dit que c'est impératif de réduire la dépendance au financement privé. C'est aussi important de le faire à Québec qu'à Montréal», a souligné la chef de Vision Montréal, Louise Harel. Elle dit avoir «alerté» la Ville et Québec au sujet de cette omission peu de temps après le dépôt du projet de loi. Le cabinet du ministre Béchard «tombait des nues», a-t-elle lancé.

L'Union des municipalités du Québec se demande pourquoi le ministre Béchard n'a pas augmenté le financement public des partis municipaux. Elle évalue la possibilité de réclamer que l'allocation prévue pour Montréal et Québec soit étendue à d'autres grandes villes et que le DGE la gère.

Les consultations publiques sur le projet de loi débuteront le 16 février. «S'il y a une demande des villes, on l'étudiera», a indiqué Pascal D'Astous.