Pour sortir l'assurance parentale du gouffre financier, le gouvernement Charest doit envisager de contribuer au régime, financé uniquement par les travailleurs et les employeurs à l'heure actuelle, estime le Parti québécois. L'Action démocratique du Québec croit plutôt que le gouvernement doit rendre le programme moins généreux parce qu'il est devenu trop coûteux.

Divisés sur les solutions à apporter, les deux partis de l'opposition s'entendent néanmoins pour condamner l'improvisation du gouvernement dans la gestion de ce programme.

 

Comme La Presse l'a révélé lundi, la caisse de l'assurance parentale sera à sec d'ici au mois d'octobre malgré une hausse des cotisations le 1er janvier et l'injection de 300 millions de dollars au printemps dernier. Le déficit cumulé se chiffrerait à 716 millions en 2013. Pour sauver les prestations des nouveaux parents, le gouvernement Charest renflouera la caisse en accordant un autre prêt au conseil de gestion de l'assurance parentale, comme l'a confirmé le ministre Sam Hamad.

«Ce qui est assez troublant, c'est que les mots planifier et prévoir ne sont pas dans le vocabulaire du gouvernement. Il fait une gestion à la petite semaine de ce programme. Et on se retrouve aujourd'hui dans une situation très inquiétante», a affirmé à La Presse, hier, le critique péquiste en matière de famille, Nicolas Girard.

Le député de Gouin reproche au gouvernement d'avoir refusé de contribuer au régime lors de son lancement en 2005-2006, comme le demandaient le patronat et les syndicats. Ils réclamaient 100 millions de dollars par année.

Aujourd'hui, le gouvernement doit étudier l'idée de financer le régime, et pas sous la forme d'un prêt. «Il faut entreprendre une réflexion sur ce plan-là. Il doit y avoir une solution globale pour assurer la pérennité du régime», a dit M. Girard. À l'heure actuelle, l'assurance parentale est financée par les cotisations des employeurs et des travailleurs, qui ont augmenté de 20% en trois ans. En dépit de ces hausses, le régime, qui a coûté 1,7 milliard cette année, est toujours déficitaire.

Pour Nicolas Girard, le gouvernement doit également convaincre Ottawa d'effacer la dette de 346,6 millions de dollars que Québec a contractée au moment de l'implantation du programme. Les congés parentaux étaient un régime fédéral auparavant. «Le gouvernement semble avoir baissé les bras, il semble prêt à payer sans rien dire», a-t-il déploré.

Selon lui, hausser les cotisations n'est pas une solution dans un contexte de ralentissement économique. Le député écarte également l'idée de rendre le programme moins généreux. «L'assurance parentale a entraîné une augmentation des naissances, et c'est une bonne nouvelle pour le Québec», a-t-il plaidé.

Le député adéquiste François Bonnardel croit au contraire que l'assurance parentale, même si elle est «importante», ne peut plus être aussi généreuse. «C'est là qu'on est rendu», a-t-il dit. «Oui, les familles sont contentes de ce programme, mais à quel prix?» Selon lui, le gouvernement doit maintenant «revoir le programme dans une certaine mesure» afin d'éviter un «gouffre financier énorme». Il qualifie de «monstrueuses» les hausses des cotisations des dernières années.

«Les libéraux ont mis en place un programme qui est bon mais qui, dès le départ, était déficitaire. Ça n'a pas de sens», a-t-il lancé. Québec n'avait prévu aucune hausse significative des naissances avec la mise en place de ce programme, ce qui est «complètement ridicule». «Les libéraux disent qu'ils sont le gouvernement de l'économie, mais ils ne savent pas compter», a-t-il ajouté.

Le Conseil du patronat a déjà demandé au gouvernement de «revoir les bénéfices associés à l'assurance parentale», comme la valeur des prestations. Selon lui, le programme a entraîné une hausse des naissances, mais «rien n'indique que les retombées d'un régime à la mesure de nos moyens seraient moins positives pour le Québec».

La CSN, qui siège au conseil de gestion de l'assurance parentale, refuse d'y apporter quelque changement que ce soit. «Il est hors de question de le rendre moins attrayant et moins généreux», a lancé sa présidente, Claudette Carbonneau. Selon elle, le gouvernement doit contribuer au régime, devenir un «troisième partenaire», avec les travailleurs et les employeurs. Accorder des prêts comme le fait le gouvernement à l'heure actuelle, «ce n'est pas une solution, c'est alambiqué», a-t-elle dit. Québec croit que le régime ne sera plus déficitaire dans cinq ans, mais c'est sans compter les prêts que le conseil de gestion devra rembourser.