Pauline Marois persiste et signe. Selon elle, on peut se demander si Jean Charest refuse de faire la lumière sur l'industrie de la construction parce qu'il ne veut pas «mordre la main qui le nourrit» en embarrassant des bailleurs de fonds du Parti libéral du Québec (PLQ), qui lui verse annuellement 75 000$.

«Mes propos n'ont pas dépassé ma pensée», a dit la chef péquiste en point de presse, hier, après avoir tenté sans conviction de nuancer ses propos de la veille. Des insinuations inusitées en ce qu'elles touchent l'intégrité personnelle de son adversaire.

Mme Marois a d'abord soutenu qu'elle avait, à plusieurs reprises au cours des dernières semaines à l'Assemblée nationale, interrogé M. Charest sur la provenance de cette allocation du PLQ, versée en sus de son salaire de premier ministre (183 000$).

Elle reconnaît ne pas avoir lié, jusqu'ici, la position du gouvernement sur une éventuelle enquête sur l'industrie de la construction à la rétribution qu'obtient M. Charest, mais Stéphane Bédard, son leader parlementaire, l'avait déjà fait, a-t-elle soutenu. Elle a affirmé que la veille, devant les militants, elle s'était contentée de «poser des questions», sans catégoriquement accuser qui que ce soit. «On a posé la question... Est-ce que c'est normal quand on n'a pas de preuve?» a dit Mme Marois.

Le député de Richelieu, Sylvain Simard, a évité de répéter ces attaques personnelles. Il estime que la sortie de sa chef est «évidemment une attaque dure. Mais il n'y a rien de dramatique, et c'est (pour Jean Charest) le prix à payer pour son refus d'avoir une enquête libre sur la construction».

Mordre la main...

Devant 500 militants péquistes réunis en colloque à Lévis, samedi, Mme Marois a tenu des propos étonnants, insinuant que le premier ministre Charest refusait une enquête pour ne pas heurter des bailleurs de fonds qui contribuaient à son salaire.

C'est parce qu'il ne veut pas «mordre la main qui le nourrit» que Jean Charest refuse de lever le voile sur l'industrie de la construction, a-t-elle laissé tomber. «Il a empoché trois quarts de million (en 10 ans) versés par le Parti libéral. La question se pose: M. Charest, pour qui travaillez-vous? Travaillez-vous pour les Québécois qui paient votre salaire de premier ministre ou pour les amis du Parti libéral qui paient votre autre salaire?»

«Je pose la question. Est-ce qu'il serait possible que Jean Charest hésite à mordre la main qui le nourrit? Est-ce que cela expliquerait pourquoi le premier ministre refuse de déclencher une enquête publique sur l'industrie de la construction?» a-t-elle renchéri, jetant un lourd pavé devant des militants silencieux. Elle a enchaîné avec le refus du gouvernement de bloquer les «crapules» qui bénéficient des excédents payés pour les contrats de construction et ajouté qu'une odeur de corruption planait au-dessus du PLQ.

Plus tard, le leader parlementaire du PQ, Stéphane Bédard, a indiqué que «tout est correct du point de vue légal», et Mme Marois ne s'exposait pas à une accusation pour diffamation en raison de ses propos à l'égard de Jean Charest.