Six mois après avoir reçu une plainte, un mois après l'expulsion de deux enfants, Québec s'engage maintenant à imposer «rapidement» des sanctions contre la garderie Le Petit Pommier de Terrebonne à la suite des révélations de La Presse.

La subvention versée à cette garderie privée -plus de 800 000$ par année- sera réduite, voire suspendue, a précisé le ministre de la Famille, Tony Tomassi.

Cette garderie de 80 places a expulsé deux enfants au mois de février après que leurs parents eurent décidé de ne plus payer le supplément de 8$ par jour qu'elle exigeait. La surfacturation est pourtant interdite dans les services de garde à 7$, sauf trois exceptions: sorties extraordinaires, articles d'hygiène et repas supplémentaires.

«Cette situation est inacceptable, et on ne tolérera pas cette situation. On va tout faire pour que ça ne se reproduise pas», a affirmé Tony Tomassi. Il n'a pas expliqué comment la garderie a pu expulser les enfants de Sébastien Dupont sans que le Ministère intervienne.

Le ministère de la Famille a reçu une plainte d'un autre parent il y déjà six mois au sujet des frais supplémentaires qu'exige Le Petit Pommier. Au mois de janvier, lorsque M. Dupont l'a avisé de la menace d'expulsion, un fonctionnaire lui a simplement donné un numéro de téléphone pour inscrire ses enfants dans un service de garde en milieu familial.

Le 26 février, le Ministère a finalement envoyé un avis à la garderie pour lui demander de se conformer à la loi et de ne plus exiger de supplément. Il lui demandait d'obtempérer avant le 12 mars, ce qu'elle n'a pas fait. Depuis, des «discussions» étaient en cours entre la propriétaire, Annie Brissette, et le Ministère pour que la loi soit respectée. Selon les déclarations du ministre Tomassi, des sanctions seront maintenant appliquées. Le Ministère agira «diligemment», a dit un porte-parole, Étienne Gauthier.

Malorie (3 ans) et Loïc (5 ans) restent à la maison depuis leur expulsion. Leur mère, qui attend un troisième enfant, est en retrait préventif. M. Tomassi a demandé aux fonctionnaires d'aider M. Dupont à leur trouver des places dans un autre service de garde.

Le député péquiste de Gouin, Nicolas Girard, a condamné l'attitude du gouvernement. «Pourquoi le ministre a-t-il traîné les pieds pendant sept mois dans cette histoire? Pourquoi avoir abandonné les parents et attendre que ça sorte dans La Presse pour agir?» a-t-il lancé.

Comme la surfacturation illégale existe depuis 2006 au Petit Pommier, «est-ce que je dois comprendre que le ministre ne vérifie pas si son règlement est appliqué?» a-t-il ajouté.

Tony Tomassi se défend d'avoir fermé les yeux sur la situation. «Les gens au Ministère font un travail colossal: dans toutes les régions du Québec, les services de garde sont inspectés. Et j'invite la population, les parents, à faire des dénonciations au Ministère. Les appels sont confidentiels et ils sont traités rapidement», a répondu le ministre, soulevant un tollé dans les banquettes de l'opposition. Il a souligné que «c'est tolérance zéro» au sujet de la surfacturation.

Selon Étienne Gauthier, «lorsque le Ministère reçoit une plainte, il agit» et vérifie si des sanctions doivent être appliquées. Mais «les règles de droit administratif imposent des délais», a-t-il précisé.

Comme l'a révélé La Presse, les parents, à qui l'on donne un reçu pour le supplément de 8$ par jour, peuvent ensuite demander un crédit d'impôt. Le gouvernement se trouve donc à rembourser aux parents des frais perçus illégalement. «L'État québécois s'en fait passer une petite vite», a dit Nicolas Girard. M. Tomassi et son ministère n'ont pas fait de commentaires sur cette pratique.

Rappelons que le supplément de 8$ est facturé aux parents pour un «service de relève parentale» de fin de semaine (qu'ils l'utilisent ou non) offert dans la même garderie par Les Ateliers Monarque, dont les profits sont versés au Petit Pommier.

La Presse a tenté une fois de plus, sans succès, d'obtenir des commentaires d'Annie Brissette.