Il n'y a pas que l'industrie de la construction qui a des entrées surprenantes au gouvernement Charest. La FTQ a aussi une influence étonnante sur ce qui se décide à Québec, accuse l'ancien ministre Marc Bellemare.

Dans un entretien accordé à La Presse hier, l'ex-ministre de la Justice a expliqué sa décision de contester la convocation du directeur général des élections - Me Bellemare était attendu hier matin au bureau du DGE pour rencontrer un enquêteur chargé de vérifier ses allégations sur l'industrie de la construction et le financement du PLQ.

 

À son avis, l'idée de comparaître devant une commission parlementaire «était la bonne». Les libéraux auraient pu poser des questions; même le premier ministre Charest aurait pu y participer, relève l'ex-ministre, qui soutient avoir des choses à révéler sur le financement du PLQ par le secteur de la construction.

«Si c'est illégal, je ne peux pas le dire, mais ce sont certainement des choses embarrassantes.»

Deux observations, précise-t-il. D'abord, la FTQ avait une influence exagérée sur le gouvernement en 2004. «Ils étaient dans le bureau du premier ministre. Il fallait se réconcilier, c'était le mot d'ordre. Beaucoup de projets de loi ont passé comme monnaie d'échange...»

D'autres sources libérales rappellent que, à titre de ministre de la Justice, Me Bellemare avait fait une vaste réforme des tribunaux administratifs. Mais son projet d'y intégrer la Commission des lésions professionnelles s'était heurté au veto d'Henri Massé, alors président de la FTQ. Convoqué au bureau de Jean Charest, le ministre Bellemare s'était vu ordonner en présence du syndicaliste ne de pas toucher à cet organisme paritaire.

Deuxièmement, «il y a l'ensemble de l'industrie de la construction qui contribue de façon significative au financement du Parti libéral du Québec».

Dans les questions touchant le financement, on trouvera, promet-il, des choses «assez grossières, assez percutantes... et c'est pour cela que j'en ai parlé à Jean Charest», qui tenait à ce que ces explications se fassent en privé, a-t-il expliqué.

Me Bellemare a expliqué son dépit devant la démarche du DGE, clairement commandée par Québec, à son avis. Le premier ministre Charest venait à peine d'en parler à l'Assemblée nationale quand l'assignation à comparaître du DGE est arrivée. Mêmes les journalistes ont su à l'avance qu'il serait convoqué. «J'ai trouvé étonnant que M. Blanchet publie un communiqué pour dire qu'il me convoquait», dit l'ex-ministre, qui a accusé le DGE d'être sous la coupe du gouvernement.

Bien des gens ont rappelé que, comme procureur général du gouvernement, Me Bellemare aurait dû immédiatement saisir la police de tout ce qu'il jugeait «embarrassant» dans le financement du PLQ.

«C'est facile à dire... mais quand cela fait partie intrinsèque du parti et du gouvernement auquel on appartient, ce n'est pas évident», observe l'ancien ministre.