Au plus bas dans les sondages, confronté à l'impopularité de son budget et à des controverses à saveur éthique, Jean Charest a cherché hier à renverser la vapeur en proposant aux Québécois un «contrat» par lequel il met sa crédibilité en jeu.

Au cours de son discours de clôture du conseil général du Parti libéral à Saint-Hyacinthe, le premier ministre a interpellé les Québécois et s'est adressé directement à eux à plusieurs reprises pour faire valoir sa «détermination» à «être à la hauteur», à se «battre pour l'avenir du Québec contre vents et marées», à «combattre le cynisme là où il est pour que nous puissions nous battre pour la prochaine génération de Québécois».Le gouvernement est «capable de passer à toutes les tempêtes» parce que ses «convictions» sont solides et sa «volonté de faire avancer le Québec», «forte» et «puissante», a-t-il ajouté devant 500 délégués libéraux.

Puis, M. Charest a fait valoir que, conformément au mandat obtenu le 8 décembre 2008, le gouvernement a «géré la crise économique» avec succès. «Mission accomplie», a-t-il lancé. Le moment est venu de «préparer la reprise». Et le budget Bachand, grâce auquel «on se tient très droit devant l'avenir», vise à prendre un «virage nécessaire», a-t-il plaidé.

Le gouvernement s'est engagé à faire «les deux tiers de l'effort nécessaire» - plus de 6 milliards de dollars en réduction de dépenses - pour retrouver l'équilibre budgétaire en 2013-2014 comme promis. «C'est ce que vous vouliez, chers Québécois, c'est ce que vous nous aviez dit, c'est ce que nous allons faire», a-t-il insisté sous des applaudissements nourris.

«Livrer la marchandise»

Les yeux fixés sur les caméras, il a ajouté plus tard, d'un ton solennel: «Je m'adresse à nouveau à vous directement. Il y a entre nous, les Québécois et le gouvernement, une entente. Il y a une entente à travers ce budget, un contrat. Mon gouvernement va respecter sa partie du contrat. Et aujourd'hui, je me charge personnellement, comme je l'ai toujours fait, de livrer cette part du contrat et de faire en sorte que le gouvernement du Québec vienne livrer sa part pour arriver à l'équilibre budgétaire. C'est l'engagement que je prends devant vous aujourd'hui: On va livrer la marchandise.»

Au cours du week-end, le ministre des Finances, Raymond Bachand, a souligné que l'impopularité de son budget s'explique en partie par le scepticisme des Québécois au sujet de la détermination réelle du gouvernement à faire le ménage dans ses dépenses et à se serrer la ceinture.

«Je n'ai jamais connu de période en 25 ans de politique où les gens ont été autre chose que sceptiques, a dit M. Charest en conférence de presse. Dans une situation comme celle-là, il faut prendre les moyens de livrer ce qu'on a dit qu'on allait faire. Dans les prochaines semaines, on va prendre des moyens importants pour s'assurer qu'on livre nos deux tiers.»

Vendredi soir, Jean Charest a justifié la hausse de la TVQ et l'imposition d'une contribution santé de 200$ par an. Mais dimanche, il s'est concentré sur l'effort financier auquel son gouvernement s'est engagé.

«Le meilleur job du monde»

«J'ai le meilleur job du monde, celui de premier ministre du Québec, a affirmé Jean Charest. Avec cette responsabilité vient également le devoir de prendre les décisions (...) pour les prochaines générations. C'est ça, l'enjeu. Le vrai test, celui que l'histoire retiendra, celui que les Québécois jugeront à la prochaine campagne électorale, est celui de savoir si les élus ont été à la hauteur de prendre les décisions pour la prochaine génération.»

La dernière semaine, «j'ai trouvé ça dur», a reconnu Jean Charest. Elle a été monopolisée par l'affaire Bellemare sur la nomination des juges et l'influence des collecteurs de fonds du PLQ. «Est-ce que ça va me distraire de ce que les Québécois attendent de moi? La réponse, c'est non. Je vais gouverner en fonction des intérêts du Québec. J'ai l'intention de livrer la marchandise.»

Jean Charest n'entend pas modifier le budget. La contribution santé restera à 200$ par année pour tous, mais il souligne que la future franchise santé - un ticket orienteur qui doit fait l'objet d'un débat dans les prochaines années - pourrait être modulée selon le revenu; Raymond Bachand l'avait déjà évoqué.

Droits de scolarité

Au cours du conseil général, les libéraux ont adopté une série de résolutions en matière d'éducation. Par exemple, le PLQ veut, à compter de 2012, augmenter les droits de scolarité «de façon à rejoindre la moyenne canadienne dans un délai raisonnable». La hausse doit être remboursable proportionnellement au revenu de l'étudiant une fois diplômé. Le programme de prêts et bourses doit être bonifié, ajoute le PLQ. Le président de la FEUQ, Jean Grégoire, s'est rendu dans l'hôtel où se tenait le conseil général pour condamner l'adoption de cette résolution.

Jean Charest entend «revoir la question de l'intégration des élèves en difficulté» dans les classes ordinaires. «Cette idée est partie d'une intention noble: faciliter l'intégration, rassembler tous les enfants. Après une dizaine d'années, il faut aujourd'hui s'interroger: est-ce vraiment la meilleure façon d'assurer la réussite des élèves en difficulté?» a-t-il dit, rappelant la lourde tâche des enseignants. Cela ne veut pas dire que les élèves sortiront des classes régulières. «On va chercher les meilleures solutions possibles. On ne veut pas jeter le bébé avec l'eau du bain», a-t-il affirmé.