Le gouvernement n'a ni le «luxe» ni les «moyens de se payer» le projet du maire Tremblay pour le réaménagement de l'échangeur Turcot, estime la ministre des Transports, Julie Boulet. Ce projet est trop coûteux à ses yeux.

Les évaluations de son ministère, dont La Presse révèle des détails ce matin, le chiffrent à six milliards de dollars.

«C'est certain que c'est à peu près trois fois le prix du projet du ministère, a affirmé Mme Boulet ce matin. Et c'est l'argent des contribuables, de tous les contribuables du Québec. Alors quand on peut faire un échangeur à deux milliards, est-ce qu'on a le luxe ou les moyens de s'en payer un de six milliards? Nous, on est là pour bien gérer l'argent de la population. Chaque dollar doit être bien investi.»

La ministre a également rappelé que le projet est «en processus depuis quelques années», et «les échéanciers sont très serrés». Elle veut la mise en service du nouvel échangeur en 2017. Selon les évaluations du MTQ, le projet du maire de Montréal ne serait complété qu'en 2022.

De toute évidence, le torchon brûle entre le maire Tremblay et la ministre Boulet. «Ce n'est pas une question de bras de fer. Il y aura des discussions. On mettra les éléments sur la table, quels sont les résultats de l'analyse du ministère par rapport aux coûts et aux échéanciers», a dit Mme Boulet.

Alors que le maire Tremblay se dit insatisfait de l'écoute du MTQ, Mme Boulet répond que, depuis le dépôt du rapport du BAPE en novembre, «il y a eu 40 rencontres avec les fonctionnaires de la Ville de Montréal sur le projet de Turcot. Des rencontres avec la Ville, il y en a eu un grand nombre, plus d'une centaine». «Moi, j'ai tout plein de dates», a-t-elle insisté. Elle souhaite s'entretenir avec Gérald Tremblay aujourd'hui.

Questionné pour savoir si le projet du maire est plus respectueux du rapport du BAPE, Mme Boulet a déclaré: «Il faut voir. Vous n'avez pas vu le travail qui a été fait au cours des derniers mois, suite au BAPE. Il y a eu beaucoup de changements dans le projet du ministère. On présentera la position du gouvernement en temps et lieu».

Rappelons qu'en novembre dernier, le BAPE a retourné le MTQ à sa planche à dessin, recommandant des modifications substantielles. Selon Mme Boulet, le projet du ministère, incluant les «bonifications» apportées à la suite du BAPE, coûterait entre 2 et 2,5 milliards de dollars.

Le critique du Parti québécois en matière de transports, Stéphane Bergeron, estime que le projet du maire Tremblay «mérite d'être analysé sérieusement». Il accuse le MTQ de «spinner des chiffres» - six milliards - pour «discréditer» le projet. «Qu'il rende public les chiffres!» a-t-il lancé, mettant en doute l'évaluation faite. Selon lui, «le projet sera payé par les générations futures, donc il doit être construit pour les générations futures». Et le projet du maire répond aux «objections», aux «préoccupations» des groupes, et aux «suggestions» du BAPE. Il recueille un «grand assentiment», a-t-il ajouté. M. Bergeron reproche au MTQ de travailler en «vase clos». De son côté, le député Bernard Drainville se demande si le MTQ a calculé les coûts sur la santé publique de son projet. Il ne faut pas seulement tenir compte du «coût du béton» mais aussi des «coûts environnementaux» d'un projet, a ajouté son collègue Scott McKay, porte-parole en matière d'environnement.