Reprenant un thème davantage associé à la droite, le Parti québécois milite en faveur d'un dégraissage de l'État et d'une hausse de la productivité des organismes publics.

Pour la chef Pauline Marois, les sociaux-démocrates doivent prendre un «virage vers l'essentiel» et se préparer à «débureaucratiser le système».

«Pour nous qui voulons préserver un filet social nécessaire, perpétuer nos valeurs progressistes, je crois qu'il y a urgence à prendre un virage, un virage vers l'essentiel. Aujourd'hui, l'essentiel, ça ne consiste pas tant à élargir le filet social, mais ça consiste à le rénover», a affirmé Mme Marois dans son discours d'ouverture du colloque de son parti à Drummondville, samedi. L'objectif de la démarche est entre autres de rendre les services publics «plus efficaces».

«Nous devons faire en sorte que les Québécoises et les Québécois aient accès aux services qu'ils méritent. Et s'il faut débureaucratiser le système, faire preuve d'audace, et vous le savez nous en somme capables, nous le ferons», a-t-elle ajouté.

Tour à tour, des députés péquistes ont assuré que le PQ ne prend pas un virage à droite. «La société change, le PQ change», a affirmé Bernard Drainville. «Ça ne sonne pas ADQ. Ça sonne bon sens.»

Pour Sylvain Simard, «c'est un discours général à gauche», en particulier chez les sociaux-démocrates en Europe. «Si le public n'est pas capable d'améliorer sa productivité, donner de meilleurs services à meilleurs coûts, ce sont les adversaires du public qui vont gagner. Si on ne le fait pas, regardez ce qui se passe par pans entiers avec les libéraux et les dangers qui nous guettent, c'est que ça passe au privé.»

Selon lui, «il n'y a rien de sacré», «rien de tabou» au PQ. Avant de quitter la vie politique, dans une sortie qui s'adressait de façon à peine voilée à son propre parti, François Legault s'était prononcé contre les «vaches sacrées».

Son message a été entendu.

«Tout doit être considéré, a dit M. Simard. C'est ça être progressiste aujourd'hui : faire en sorte que l'État donne de meilleurs services à un meilleur coût de façon à ce qu'on retrouve équilibre dans les finances publiques et en même temps que les citoyens aient le sentiment d'en avoir pour leur argent.»

Pour Pascal Bérubé, «les valeurs de l'efficacité et du rendement, ce n'est pas l'apanage des libéraux ou de la droite. Les sociaux-démocrates doivent avoir ces valeurs-là en tête également».

«On n'est pas en train de froisser nos alliés» syndicaux, a-t-il ajouté. «Les gens qui offrent les services publics savent très bien que s'ils veulent protéger les services, ils ont intérêt à les livrer de la façon la plus efficace possible.»

L'ancien chef syndical Marc Laviolette se méfie. «Ça me fait penser à un wiper : un petit coup à gauche, un petit coup à droite. Et quand tu fermes le moteur, ça tombe à droite. On n'est pas tellement de cette école-là», a dit le président du SPQ-Libre, un club politique qui n'est plus reconnu au sein du PQ.

Le colloque se déroule sous le thème Un gouvernement souverainiste au service des Québécois et met sur la table des propositions rarement vues au Parti québécois. Le cahier de propositions soumis aux militants demande par exemple s'il faut «envisager de revoir les services qui sont actuellement rassurés par la Régie de l'assurance maladie».

Or plusieurs députés ont rejeté d'entrée de jeu cette proposition. Pourquoi ouvrir le débat sur le sujet alors? «La question, elle est posée dans la population. Alors on ne peut pas l'exclure. Si on ferme le couvercle ici, on le fermera. Ce sera tant mieux», a dit Monique Richard, une ancienne chef syndicale.

La semaine dernière, le premier ministre Jean Charest a accusé le PQ de vouloir mettre la hache dans le panier de services assurés. «La politique est un risque perpétuel, a répondu Mme Richard. Il faut savoir mettre nos culottes et un moment donné poser les questions pour avoir les idées claires et des propositions franches, transparentes avec la population. C'est l'objectif du questionnement qu'on fait.»

«Réduire le panier de services, ce n'est pas mon option», a dit de son côté Bernard Drainville. «Ceci dit, il faut poser la question aux militants pour savoir ce qu'ils en pensent.» Ce questionnement est «normal» selon lui dans le contexte actuel des finances publiques. Les «premières indications» qu'il a eues des militants, «c'est qu'on n'ira pas dans cette direction-là». L'atelier consacré à la santé a confirmé ses dires : aucun militant n'a approuvé une réduction du panier de services. En fait, seulement deux péquistes ont abordé le sujet : l'un pour demander que la question soit confiée à un comité, l'autre pour plaider au contraire en faveur de l'élargissement du panier de services.

Pendant leur colloque, les péquistes débattent également d'un «allègement des structures», en particulier des commissions scolaires et des agences régionales de la santé. Danielle Doyer, de Matapédia, a fait valoir que ces structures sont importantes en région. «Ce n'est pas parce qu'on n'est pas d'accord avec certaines décisions» qu'il faut éliminer ces structures, a-t-elle dit.

Nicolas Marceau a milité pour un dégraissage dans les sociétés d'État. «Je pense qu'il y a là des problèmes. Je soupçonne qu'il y a moyen d'aller chercher de l'argent dans les sociétés d'État», a-t-il affirmé.