Les péquistes résistent à prendre le «virage vers l'essentiel» que leur a proposé Pauline Marois. Ils ont rejeté hier l'idée d'abolir les agences régionales de la santé et les commissions scolaires, des structures que leur chef remettait pourtant en question.

Qu'à cela ne tienne, Pauline Marois envisage de ramener sur le tapis une révision de ces deux structures au cours d'une prochaine rencontre de son parti.

 

Les membres ont également fermé la porte qu'avait entrouverte leur chef au sujet d'une révision du panier de services couverts par l'assurance maladie.

Samedi, dans son discours d'ouverture du colloque péquiste à Drummondville, Pauline Marois a affirmé qu'«il y a urgence à prendre un virage vers l'essentiel» afin de «préserver un filet social nécessaire» et de «perpétuer les valeurs progressistes» de son parti. Elle a lancé un appel à «débureaucratiser le système», reprenant un thème associé à la droite.

Le cahier de réflexion soumis aux militants suggérait ainsi l'abolition des agences régionales de la santé et un «allègement» de différentes structures comme les commissions scolaires. Pauline Marois s'est prononcée en faveur de l'élimination des agences et d'une révision importante des commissions scolaires.

Or, au cours des ateliers de la fin de semaine, les péquistes ont écarté ces deux options. Hier, lors du compte rendu de l'atelier sur la santé, le député de Marie-Victorin, Bernard Drainville, a confirmé le refus des militants d'abolir les agences régionales. Les militants demandent toutefois qu'elles soient «plus efficaces et performantes», a-t-il noté. Selon la députée Danielle Doyer, de Matapédia, «le Parti québécois, c'est un parti de régionalisation et de décentralisation des pouvoirs. Et les agences sont un partenaire important».

«Moi, le virage à droite, à gauche, en haut, en bas... J'ai une position: on doit avoir le maintien des agences et des commissions scolaires», a-t-elle ajouté.

De son côté, l'ex-candidat Réjean Hébert, un médecin, a signalé que les membres souhaitent le maintien du Conseil des aînés, structure dont le gouvernement a annoncé l'élimination dans son dernier budget.

Dans un autre compte rendu d'atelier, celui-là sur l'éducation, Pierre Curzi a fait valoir que les militants refusent d'abolir les commissions scolaires. Ils souhaitent plutôt «un ménage dans les étages superposés du ministère» de l'Éducation, a dit le député de Borduas.

Désaveu?

Pauline Marois ne voit pas dans toutes ces prises de position un désaveu des militants à son endroit. «Dans certains cas, peut-être que davantage de gens ont souhaité conserver certaines structures, mais jamais on n'a dit qu'on devait les conserver comme elles sont. Dans tous les cas, ça a été de dire: faisons en sorte qu'on les rende plus efficaces, qu'on les débureaucratise, qu'on partage les pouvoirs autrement», a-t-elle plaidé en conférence de presse.

Malgré l'avis exprimé par ses militants, la chef péquiste envisage de revenir à la charge. «Sur les structures, et sur la réorganisation de la façon dont on livre certains services, il n'y a pas eu unanimité, il y a eu débat» au cours de la fin de semaine, a-t-elle dit. «Je crois qu'on peut revenir avec certaines de ces propositions-là. Ça pourrait être ramené pour qu'on les rationalise et qu'on les ramène à des petites entités. Je crois qu'il faut se permettre de finir le débat sur ça.»

Soulignons que le colloque a permis aux militants de débattre de propositions, mais que celles-ci n'ont pas été soumises au vote. Le conseil exécutif du parti - dont Mme Marois est membre - tiendra compte des débats de la fin de semaine et de ceux survenus lors de précédents colloques pour rédiger une «proposition principale» en vue du congrès des membres d'avril 2011. Cette proposition sera rendue publique le 19 juin, fera l'objet de débats au cours des mois suivants, puis sera soumise au vote des membres.

Le panier de services

Le débat est toutefois clos dans le cas d'une révision du panier de services couverts par l'assurance maladie, proposition qui figurait dans le cahier de réflexion. Le 30 avril, Pauline Marois avait ouvertement envisagé cette option: «Est-ce qu'on ne pourrait pas imaginer que certains services offerts deviennent moins essentiels ou moins nécessaires et que ces services soient retirés du panier?» Cette déclaration a fait les délices de Jean Charest, qui l'a reprise en Chambre pour embarrasser les péquistes.

«Sur le panier de services, les gens, à la limite, n'ont pas voulu en discuter, car ils souhaitent qu'on le préserve. Je ne souhaite pas qu'on revienne sur cette question», a indiqué Mme Marois. Les militants ont proposé une «idée porteuse», selon elle, avec la création d'une caisse d'assurance vieillesse contre la perte d'autonomie. Les moyens de la financer n'ont toutefois pas été précisés.

De son côté, Pierre Dubuc, du SPQ-Libre - club politique qui n'est plus reconnu au sein du PQ -, s'est dit satisfait qu'«aucun virage à droite» ne se soit produit durant la fin de semaine.

En réaction au colloque du PQ, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Yves Bolduc, a affirmé que Pauline Marois s'est fait rabrouer par ses militants et «n'a aucune autorité». «Le Parti québécois refuse de faire une réévaluation de la bureaucratie et ne propose pas de nouvelles idées», a-t-il dit.