À coups de motion de censure et de menace de bâillon, le gouvernement et l'opposition péquiste n'auront ménagé aucun effort pour s'affronter jusqu'à la toute fin de la présente session.

Des deux côtés, les manoeuvres d'obstruction parlementaire pourraient même forcer les élus à siéger jusqu'à lundi, au lieu de mettre un terme à leurs travaux comme prévu vendredi.

La chef péquiste, Pauline Marois, doit, en principe, terminer la session, vendredi, en déposant une motion de censure, visant pour une énième fois à blâmer le gouvernement pour «son refus obstiné» de déclencher une commission d'enquête sur l'industrie de la construction en lien avec le financement des partis politiques.

Mais l'opposition péquiste craint que le gouvernement la prenne de vitesse, et interrompe les travaux dès jeudi, pour éviter de devoir débattre une fois de plus, pendant des heures, d'allégations de corruption.

Un des scénarios envisagés mercredi ferait en sorte que le premier ministre reconvoquerait la Chambre, par la suite, dès jeudi soir, pour suspendre les règles habituelles et faire adopter vendredi, sous le bâillon, le projet de loi 100 sur les mesures contenues dans le budget.

Ce projet de loi serait alors le seul sujet de discussion à l'ordre du jour de la séance extraordinaire, ce qui veut dire que la motion de censure péquiste s'en trouverait aussitôt reléguée aux calendes grecques.

Officiellement, cependant, au gouvernement, on soutient que l'étude du projet de loi se poursuit et qu'on ne commentera pas les scénarios hypothétiques.

Depuis des jours, le ministre des Finances, Raymond Bachand, fait pression sur son leader parlementaire, Jacques Dupuis, en insistant publiquement pour dire que son projet de loi doit absolument être adopté cette semaine, ce que conteste d'ailleurs l'opposition péquiste.

Car aux yeux du porte-parole péquiste en finances, Nicolas Marceau, rien ne justifie une telle précipitation de la part du gouvernement.

«Les raisons invoquées n'ont pas de sens, ne sont pas raisonnables, et on ne va pas céder à ce genre de manoeuvre-là», a-t-il dit en point de presse.

Contrairement à ce que prétend le ministre Bachand, il n'a pas besoin d'une loi pour mettre en vigueur les différentes mesures de compression contenues dans le budget, selon M. Marceau.

Pour preuve, il a fait valoir que déjà, sans loi, le sous-ministre à la Santé, Jacques Cotton, avait émis une directive aux dirigeants d'établissements de santé et d'agences, pour leur dire de se conformer aux mesures budgétaires.

Le projet de loi 100 comporte plusieurs mesures impopulaires comme la cotisation-santé imposée à tous les contribuables, les hausses de tarifs des services publics, la réduction de 10 pour cent des dépenses administratives des organismes de l'État et les coupes de 25 pour cent des budgets de publicité et de formation.

De son côté, la députée adéquiste Sylvie Roy a déploré la tournure des événements.

«C'est toujours regrettable un bâillon, parce que c'est une suspension des règles démocratiques», a-t-elle dit, en point de presse.

«Avec la maigreur du menu législatif, on avait amplement le temps de procéder à l'adoption article par article de ce projet de loi-là», a-t-elle estimé, accréditant la thèse péquiste.

Quant à eux, les députés indépendants et ex-adéquistes Éric Caire et Marc Picard ont pris de l'avance en présentant avant tout le monde - et avant la fin - leur bilan de session.

Cette session aura surtout été marquée, selon eux, par «le cynisme, l'arrogance et les insultes».