Le gouvernement Charest se cherche des alliés dans la refonte controversée de la carte électorale qu'il pilote.

Les libéraux veulent faire plier l'opposition péquiste, qui refuse le projet de loi 92, proposé à la place du scénario du Directeur général des élections (DGE), qui ferait disparaître des circonscriptions en région. Le PQ suggère plutôt une autre solution dans cette bataille où les deux partis s'accusent mutuellement d'abandonner les régions.

À l'ouverture du congrès de la Fédération québécoise des municipalités (FQM), à Québec, jeudi, Jean Charest a demandé aux élus municipaux de l'aider.

«Je pense que vous avez, vous, une occasion de faire plier Mme (la chef péquiste Pauline) Marois et le PQ, et de leur faire entendre raison au nom des régions du Québec, a-t-il déclaré, devant un parterre d'élus qui l'ont applaudi au terme de son discours. C'est ce que mon gouvernement souhaite, c'est ce que nous allons défendre avec vous.»

Même si son parti est majoritaire en Chambre, M. Charest demande aux élus de faire pression sur les péquistes parce qu'il faut un consensus à l'Assemblée nationale sur cette question délicate.

Même le président de la FQM, Bernard Généreux, a demandé aux élus de l'Assemblée nationale, notamment aux péquistes, de rappeler le projet de loi 92, quitte à l'amender.

«Faites en sorte que la carte électorale continue de représenter, à l'Assemblée, la présence des régions. C'est indispensable pour la suite du monde!» s'est-il exclamé, en recueillant ainsi une ovation des élus.

La riposte de Mme Marois ne s'est pas fait attendre. En après-midi c'était à son tour de s'adresser aux élus municipaux.

«Je n'ai pas de problème, vous pouvez faire des pressions, je suis capable d'en prendre, d'ailleurs!» a-t-elle lancé devant les participants au congrès.

Mme Marois a fait valoir que le projet de loi 92 finira par faire diminuer le poids des régions en ajoutant constamment des sièges dans les régions métropolitaines.

Elle suggère plutôt d'ajouter des critères dans la loi électorale, pour que le Directeur général des élections tienne compte de la »représentation effective« des citoyens des régions. En d'autres mots, protéger des circonscriptions en tenant compte du fait que des électeurs seraient mal servis par un député qui serait trop loin, dans un comté trop grand.

Elle demande donc au premier ministre de revenir avec un autre projet de loi que sa formation appuiera.

«On pourrait ainsi préserver les comtés de la Gaspésie et les comtés du Bas-du-Fleuve», a-t-elle expliqué aux élus, qui n'ont pas caché leur désarroi devant l'impasse et qui ont fait part de leur opposition à l'autre solution, proposée par le DGE.

«S'il ne se passe rien, la carte (électorale du DGE) va être publiée dans la Gazette officielle et puis c'est ça qui va s'appliquer. À un moment donné, même si vous trouvez pas la bonne solution tout de suite, y aurait-il moyen de suspendre le carnage en attendant?» a demandé à Mme Marois un élu municipal de Gaspésie, Bertrand Berger.

Piloté à l'origine par le defunt ministre Claude Béchard, le projet de loi 92 visait a court-circuiter la réforme de la carte électorale déposée par le DGE.

Le projet de loi aurait eu pour effet d'augmenter sensiblement le nombre de députés à l'Assemblée nationale. Il aurait maintenu des circonscriptions qui auraient dû disparaître en raison de leur décroissance démographique, notamment dans le Bas-du-Fleuve et en Gaspésie. En revanche, il aurait augmenté de façon constante le nombre de circonscriptions dans la région de Montréal.

Comme l'opposition officielle, le DGE était défavorable au projet de loi, parce qu'il distorsionnait la représentativité: certains comtés auraient eu 27 000 électeurs, d'autres plus de 60 000.