Le gouvernement Charest n'en a pas fini avec les débats à saveur identitaire. Il vient de remettre sur le tapis le projet de loi 94 sur le port du voile intégral dans les institutions publiques.

À la surprise générale, la consultation sur le projet de loi 94 avait été interrompue au mois de mai. Elle devait reprendre le 15 août, mais la convocation a été annulée. Elle reprendra finalement mardi, a annoncé le gouvernement Charest.

Le projet de loi 94 prévoit que les employés de l'État et les personnes qui reçoivent des services des organismes publics et parapublics doivent avoir «le visage découvert lors de la prestation des services».

Le ministre de la Justice et leader parlementaire, Jean-Marc Fournier, affirme que la position du gouvernement se fonde sur le principe de la laïcité ouverte et qu'elle est «équilibrée». Notons que la ministre Kathleen Weil, passée de la Justice à l'Immigration, continuera de défendre le projet de loi qu'elle avait déposé à l'Assemblée nationale. Selon son cabinet, aucun amendement n'est prévu pour le moment.

Or, aux yeux de l'opposition, le projet de loi est «insuffisant» et «vide». Le Parti québécois et l'Action démocratique du Québec veulent interdire aux employés de l'État de porter tout signe religieux ostentatoire. Le PQ, qui a fait de l'identité son cheval de bataille, réclame l'adoption d'une charte de la laïcité. Il reproche au gouvernement de rejeter l'une des recommandations du rapport Bouchard-Taylor, qui avait proposé la rédaction d'un livre blanc sur la laïcité.

Qu'ils soient pour ou, surtout, contre le projet de loi 94, plusieurs groupes entendus en commission parlementaire jusqu'à présent ont réclamé la tenue d'un débat plus large sur la laïcité.

Dans les circonstances, le gouvernement aura-t-il recours au bâillon pour adopter son projet de loi avant les Fêtes? Chose certaine, le PQ n'a pas l'intention pour le moment de s'opposer aussi farouchement au projet de loi 94 qu'à celui sur l'accès à l'école anglaise.

«Si le gouvernement fait comme pour la loi 103 et ne change rien, qu'est-ce qu'on ferait? Le problème avec le projet de loi 94, ce n'est pas ce qu'il y a dedans, c'est ce qu'il n'y a pas dedans. Alors pour nous, c'est différent comme approche», a affirmé la députée péquiste Louise Beaudoin. Son objectif est de «remplumer le projet de loi».

Le printemps dernier, Mme Beaudoin s'était dite prête à présenter bientôt une charte de la laïcité. Le PQ a finalement choisi de présenter une série de mesures dans la «proposition principale» qui a été dévoilée l'été dernier et qui sera soumise au vote des membres au congrès de 2011.

En plus d'interdire le port de signes religieux ostentatoires dans la fonction publique, la charte d'un gouvernement péquiste affirmerait que «le Québec est un État laïque, neutre par rapport aux croyances ou non-croyances des uns et des autres en matière de religion». «La liberté de religion ne peut être invoquée pour enfreindre le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes ou le bon fonctionnement des institutions publiques et parapubliques», ajoute le PQ dans sa proposition principale.

Le parti de Pauline Marois entend retirer leurs subventions aux écoles dont «les admissions sont fondées sur l'appartenance confessionnelle». Il y en aurait une vingtaine, selon Louise Beaudoin.