Rédiger les discours d'un premier ministre n'est pas une tâche facile a priori, mais cela a rapporté près de 310 000$ en six ans à l'auteur pigiste Patrice Servant.

L'auteur attitré de Jean Charest a reçu plusieurs autres contrats similaires, aussi sans appel d'offres, de sept autres ministres ou ministères pour un minimum de 100 000$, selon des documents que La Presse a obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information.

Il s'agit essentiellement des ministres de l'Immigration, du Développement économique, des Transports et des Finances.

Les contrats les plus lucratifs, à première vue, ont été accordés pour la préparation des discours sur le budget de 2007 (23 250$) et de 2008 (17 325$) de l'ex-ministre Monique Jérôme-Forget.

«Certains discours prennent plus de temps à écrire et demandent beaucoup de recherches, explique Patrice Servant. Par exemple, pour celui de l'Ordre national du Québec, je peux avoir jusqu'à 35 biographies à rédiger.»

Les documents fournis à La Presse ne permettent pas de savoir quels discours M. Servant a écrits pour Jean Charest, ni leur nombre, ni à quelle occasion particulière.

Les relevés indiquent seulement la période et qu'il s'agit de «fournir les services professionnels de préparation et de rédaction de discours pour le premier ministre».

«Je facture le même taux horaire pour tous, dit Patrick Servant. Je vends mon expertise à l'heure.»

Hugo d'Amours, l'attaché de presse du premier ministre, explique que Patrice Servant est un collaborateur de longue date de Jean Charest. «Ce n'est pas tout le monde qui peut rédiger les discours du premier ministre. Il faut avoir une parfaite connaissance de la politique et de la personne pour qui l'on écrit, car cette dernière doit se reconnaître dans les propos.»

Il explique aussi que Patrice Servant était employé salarié du cabinet (de l'été 2002 à l'été 2004) avant même l'arrivée du PLQ au pouvoir. Il a ensuite choisi de démissionner et de travailler à son compte. Cela représenterait donc une économie pour le cabinet du premier ministre, dit M. D'amours, en plus de permettre à M. Servant de signer des contrats avec d'autres clients.

«52 000$ par an en moyenne pour quelqu'un de sa trempe, ce n'est pas cher payé», conclut Hugo d'Amours.

Patrice Servant précise qu'il a quitté cet emploi à plein temps, payé 90 000$ annuellement, pour mieux s'acquitter de sa tâche en étant au contact de la population: «Le rédacteur du premier ministre ne devrait pas se trouver dans le vase clos du cabinet», croit-il.

En décembre 2008, La Presse avait publié dans ses pages Opinions une longue lettre écrite par Patrice Servant intitulée «Le "nouveau" Charest». L'auteur, qui se présentait comme «principal rédacteur des discours de Jean Charest», n'y tarissait pas d'éloges envers ce «battant» qui n'était pas selon lui un «premier ministre ordinaire».

Au début du mois de décembre, le Parti québécois a dénoncé plusieurs contrats accordés par Québec à la firme de relations publiques National.

- Avec la collaboration de William Leclerc