Qu'importent la dévotion des fidèles sikhs et les critiques du Canada anglais, le poignard rituel n'a pas sa place à l'Assemblée nationale, estime l'Action démocratique du Québec.

Comme pour l'ensemble de la société québécoise, la communauté sikhe doit elle aussi se plier à des accommodements raisonnables, pense le chef de l'ADQ, Gérard Deltell.

«Ça fait partie des accommodements. Si vous venez ici (à l'Assemblée nationale) vous laissez votre kirpan de côté. Cela n'enlève strictement rien à la pratique de votre foi ou à l'esprit qui vous anime mais techniquement, vous respectez les règles et les règles disent que le kirpan n'a pas sa place ici», a soulevé M. Deltell lundi en marge d'une réunion du caucus adéquiste.

Le leader de l'ADQ et son député François Bonnardel ont salué le travail du service de sécurité de l'Assemblée nationale qui a interdit l'accès au parlement à quatre sikhs le 18 janvier.

Membres de la World Sikh Organization of Canada (WSO), les visiteurs ont été éconduits parce qu'ils refusaient de mettre en consigne leur kirpan, le poignard rituel que doivent porter les fidèles de cette religion.

Pour le chef de l'ADQ, les visiteurs qui se présentent à l'Assemblée nationale doivent respecter les règles de sécurité prescrites peu importe leur appartenance religieuse.

D'autant plus, a pris soin de rappeler M. Deltell, que les quatre représentants sikhs avaient été avisés au préalable qu'ils ne pourraient entrer dans l'enceinte du parlement sans déposer leur kirpan à la sécurité.

S'agissait-il alors d'un coup monté par quelques fondamentalistes religieux pour «tester» la tolérance de l'Assemblée nationale? Le leader de l'ADQ préfère ne pas s'aventurer sur ce terrain.

«C'est clair qu'ils savaient que les règles étaient prescrites et qu'il n'était pas question pour l'Assemblée nationale de faire une exception», s'est-t-il limité à dire.

De son côté, le député Bonnardel a évacué d'un trait le débat sur la charge spirituelle que représente le kirpan pour les sikhs.

Quelle que soit la signification que lui donnent les dévôts, le kirpan «reste une arme» et les armes sont proscrites à l'Assemblée nationale, a-t-il déclaré.

«Il n'y a pas d'accommodement à consentir dans un tel cas. Si je fonde une petite église et le canif suisse devient mon objet de culte, est-ce qu'on va me laisser entrer à l'Assemblée nationale avec mon canif? Non», a illustré le député de Shefford.

La décision des agents de sécurité de l'Assemblée nationale de refuser l'accès aux quatre représentants de la communauté sikh a créé des remous au Canada anglais.

Au nom du multiculturalisme, des commentateurs sont montés au créneau pour défendre le droit des sikhs à porter le kirpan ou bon leur semble au pays.

Le chef du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff, partage cette vision des choses. Il a affirmé la semaine dernière que le kirpan n'est pas une arme et qu'il a place tant à la Chambre des communes qu'à l'Assemblée nationale.

M. Deltell accueille ces critiques avec un haussement d'épaules.

«Je sais que ça soulève un débat à travers le Canada tout entier par rapport à ce qui se passe ici mais nous assumons pleinement les règles qui existent ici à l'effet que le kirpan n'a pas sa place», a-t-il souligné.