L'éducation doit être la «priorité nationale» au Québec. Mais, pour atteindre cet objectif, il faudra mettre de côté la sécurité d'emploi des enseignants, exiger des comptes des directeurs d'école et réduire les commissions scolaires à leur plus simple expression.

C'est le plan audacieux qu'a proposé hier l'ex-ministre péquiste de l'Éducation François Legault. Dirigeant de la Coalition pour l'avenir du Québec, M. Legault a manifestement décidé de donner un second souffle aux «contrats de performance» qu'il avait proposés à l'époque où il était membre du gouvernement de Lucien Bouchard.

D'entrée de jeu, la coalition propose d'augmenter les salaires des enseignants. La rémunération actuelle «n'est pas à la hauteur de l'importance de leurs responsabilités», affirment les 12 signataires du groupe. Mais ces meilleurs salaires auront une contrepartie: la performance des enseignants, leur compétence et leur motivation seront évaluées par l'administration de leur école. «La grande majorité des enseignants sont compétents», insiste François Legault. Mais, à son avis, il y a un passage obligé: «rouvrir les conventions collectives avec les enseignants» - comme avec les médecins, d'ailleurs.

«Les enseignants qui sont compétents et motivés n'ont pas à s'inquiéter de leur sécurité d'emploi dans le modèle qu'on veut proposer», a soutenu M. Legault. Les autres devront se recycler ou faire autre chose.

Il est conscient de la gifle qu'il inflige aux organisations syndicales: «L'évaluation, c'est presque un dogme, du côté des syndicats. On s'attaque à gros.»

Les directeurs des 2300 écoles primaires et secondaires auront plus d'autonomie, mais ils seront aussi évalués. Et le rendement devra être au rendez-vous: «Quand une école fonctionne moins bien, il faut qu'il y ait des conséquences», a prévenu l'ancien ministre.

Les commissions scolaires seront réduites à leur plus simple expression, «des structures très légères» pour acheminer les ressources.

«On ne parle pas de privatisation, il faut un dégraissage important du côté des structures des réseaux scolaires et de la santé» a par la suite précisé M. Legault en point de presse.

La Coalition estime qu'il faut régler la «lancinante question du sous-financement» des universités. Il faudra hausser les droits de scolarité et demander un effort plus important aux contribuables.

Pas de hausses d'impôts

Mais il n'est pas question d'augmenter les impôts, a dit Charles Sirois - ni de les réduire à moyen terme, opine de son côté François Legault. En 2003, le ministre péquiste s'opposait aux baisses d'impôts; c'est encore son credo.

«Actuellement, il n'y a pas de marge de manoeuvre pour baisser les impôts des particuliers. À long terme, on en souhaite toujours, des baisses d'impôts, mais à court terme, l'important est de rétablir l'équilibre budgétaire», a soutenu M. Legault.

Pour payer davantage les enseignants, il y a «beaucoup de travail de rationalisation à faire dans les dépenses», en particulier celles d'Hydro-Québec et du réseau de la santé.

Des économies «énormes» sont à portée de main en réduisant les dépenses des agences régionales de la santé - le budget de cette structure est de plus de 800 millions de dollars, «de l'argent qu'il faut ramener dans les établissements», tranche-t-il.

En revanche, à son avis, il n'y a pas lieu d'augmenter les tarifs d'électricité au-delà des hausses déjà prévues au dernier budget de Raymond Bachand. Il n'y a pas lieu non plus d'accroître les tarifs des services aux citoyens. «Ce qui a été annoncé dans le budget de M. Bachand, selon lui, est suffisant pour les revenus; il faut se pencher du côté des dépenses.»

La responsabilisation dans le secteur de l'éducation doit s'imposer aussi dans celui de la santé. Il faut que les médecins généralistes «prennent en charge des patients»: «Il y a trop de médecins de famille qui ne prennent pas de patients, qui n'ont même pas de secrétaire pour prendre les téléphones», dit l'ancien ministre péquiste.

La Coalition s'engage sans équivoque pour l'imposition de la Charte de la langue française. La langue «assure le caractère unique du Québec», et «le français doit être la langue de l'espace public partout au Québec».

«Ce qui nous lie entre nous, c'est la langue, a dit Charles Sirois, et en même temps, c'est la menace à cause de la loi du nombre. La langue qui nous définit comme nation risque de disparaître. C'est quelque chose d'important.»

François Legault ne croit toutefois pas qu'il faille imposer la loi 101 au collégial, comme veut le faire le Parti québécois. «Tant qu'on n'aura pas réussi à mieux enseigner l'anglais au primaire et au secondaire, je comprends très bien un jeune de 18 ans d'opter pour un cégep anglophone pour y parfaire son anglais.»

En revanche, il désapprouve la décision de Québec dans le dossier des écoles-passerelles: «Il est anormal qu'on puisse, pour plusieurs générations, s'acheter le droit de fréquenter le réseau scolaire anglophone.»