Ce n'est pas un recentrage, mais un changement de cap inspiré par le «gros bon sens», ont soutenu dimanche plusieurs adéquistes pour expliquer la décision du parti d'envoyer aux oubliettes plusieurs résolutions susceptibles de soulever la controverse.

«Il n'y a pas de recentrage, c'est une question de gros bon sens», a soutenu le fondateur du parti, Me Jean Allaire. Il est plusieurs fois intervenu pour convaincre les militants d'écarter des propositions comme la privatisation partielle d'Hydro-Québec, ou une diminution du nombre de métiers dans la construction. Les militants ont aussi appliqué les freins sur la réduction du mandat de la Caisse de dépôt et sur l'implantation des partenariats publics privés. Les 350 délégués se sont rabattus sur quelques résolutions destinées à forcer les centrales syndicales à faire preuve de plus de transparence, une cible pointée samedi matin par Gérard Deltell dans son discours d'ouverture.

«Il y a juste les fous qui ne changent pas d'idée», a dit Marc André Morency, le responsable de l'organisation pour la commission des jeunes de l'ADQ. En 2008, sous Mario Dumont, l'ADQ prônait une privatisation partielle d'Hydro. «Maintenant c'est le parti de Gérard Deltell. On a décidé d'être de centre droit. Hydro-Québec, il y a des gens qui y tiennent».

Pour la députée de Lotbinière, Sylvie Roy, l'ADQ ne prônait pas une privatisation en 2008. «Ce n'était pas une privatisation, c'était d'acheter des actions!» a-t-elle laissé tomber.

La majorité des militants ont adopté de bonne grâce le virage, mais plusieurs ont souligné leur déception. Un militant de Mauricie parla de «l'Inaction démocratique» tandis que d'autres soulignaient ne pas comprendre que leur parti soit subitement devenu aussi frileux.

Me Allaire s'était entretenu avec François Legault avant que celui-ci ne publie le premier manifeste de la Coalition pour l'avenir du Québec. Des sources indiquent aussi à La Presse que l'avocat de Laval échange fréquemment avec l'ancien président du parti, Mario Charpentier, un ami personnel de l'ancien ministre péquiste. «Je parle à qui je veux quand je veux», a lancé, agacé, Me Allaire.

Les militants ont choisi de se limiter à un seul combat, celui des syndicats. Ils ont adopté samedi plusieurs propositions réclamant plus de transparence aux organisations syndicales. Les campagnes politiques des centrales devraient être défrayées par des cotisations distinctes des fonds amassés pour la défense des travailleurs.

Le député de Beauce Janvier Grondin est venu atténuer ses propos de la veille. Il avait soutenu qu'il se voyait facilement dans un parti dirigé par François Legault: «C'est comme si je voulais sortir Gérard Deltell. Ce n'est pas le cas. M. Legault est bienvenu dans le parti, mais de là à mettre Deltell dehors, c'est une autre affaire», a-t-il lancé.

Pour Richard Thibault responsable de la commission des communications au parti, «retourner des propositions à la commission politique ce n'est pas les mettre aux oubliettes». Il a eu du fil à retordre pour expliquer pourquoi, à chaque occasion, l'ADQ avait rayé toute précision, tous les chiffres d'économies attendues des décisions adoptées. Ces changements ont été apportés à la recommandation «de nos avocats», a-t-il soutenu.