Les syndicats devraient tirer une leçon de la charge à fond de train que leur a livrée l'Action démocratique en fin de semaine dernière, a estimé lundi Amir Khadir.

Pour des raisons fort différentes sinon opposées, la droite et la gauche politiques québécoises croient que le temps est venu pour les organisations syndicales de faire un examen de conscience.

Comme son vis-à-vis Gérard Deltell, le co-chef de la formation de gauche Québec solidaire souhaite lui aussi que les organisations syndicales abandonnent le corporatisme et cessent de se comporter en lobby pour les plus nantis.

«Dans le débat sur le budget Bachand, il y a des syndicats qui étaient prêts à accepter une augmentation de certains tarifs pour sauver les salaires des syndiqués. Or, l'augmentation de ces tarifs frappait durement les salariés au bas de l'échelle, non syndiqués», a illustré M. Khadir lors d'un entretien avec La Presse Canadienne.

Avec sa critique virulente des centrales syndicales, l'Action démocratique de Gérard Deltell rejoint non seulement les militants de la droite les plus convaincus mais aussi bon nombre de citoyens dits ordinaires, constate le député de Mercier.

«Quand on pratique un syndicalisme plutôt corporatiste, et il y en a, c'est sûr qu'il y a des gens dans notre société qui se sentent exclus, qui se sentent désolidarisés par rapport aux autres travailleurs», a analysé M. Khadir.

Conséquemment, selon lui, les leaders syndicaux auraient tout intérêt à faire le point sur leur façon de pratiquer le syndicalisme dans le Québec d'aujourd'hui.

«Il y a un examen de conscience à faire et sans doute que les syndicats doivent apprendre à avoir une vision moins obtuse et défendre les dossiers des droits de façon plus cohérente non seulement pour les syndiqués, mais pour l'ensemble de la société d'en bas», a-t-il dit.

Toutefois, là s'arrête le rapprochement entre l'ADQ et Québec solidaire.

Contrairement à M. Deltell, le leader de QS ne croit pas que les syndicats «en mènent trop large» dans la sphère publique, bien au contraire.

En dépit de leurs travers, les organisations syndicales doivent occuper le plus de terrain possible pour protéger les acquis de «150 ans de lutte et de sacrifices», a-t-il fait valoir.

«Le régime d'assurance maladie universel, l'école publique, ce sont des acquis issus de luttes syndicales. Les syndicats doivent renouer davantage encore avec les causes sociales qui bénéficient à tout le monde. Les syndicats ne doivent pas s'intéresser uniquement à leurs droits corporatistes», a insisté M. Khadir.

En fin de semaine dernière, devant 350 militants adéquistes réunis en conseil général à Trois-Rivières, M. Deltell a dénoncé les leaders syndicaux qui, à ses yeux, «parlent de tout et de rien, sans mandat».

Le chef de l'ADQ espère limiter le rôle des organisations syndicales aux strictes activités de renouvellement des conventions collectives et de défense des conditions de travail.

Les syndicats n'ont pas été créés pour épouser les causes politiques et sociales les plus diverses mais pour défendre les travailleurs, considère M. Deltell.

Pour Amir Khadir, les positions adoptées par M. Deltell pour restreindre le rôle des syndicats s'inspirent du courant de droite américain qui secoue des États comme celui du Wisconsin.

À l'opposé de l'ancien chef Mario Dumont qui était à l'écoute de sa base, M. Deltell semble retenir les idées que lui souffle le patronat, a dit le cochef de Québec solidaire.