Comme les péquistes, les libéraux sont divisés au sujet du projet de loi que veut faire adopter le maire Régis Labeaume pour blinder son entente avec Quebecor sur la gestion du futur amphithéâtre. Un député de Québec croit même que le gouvernement a «baissé ses culottes» et s'est «écarté les fesses» en acceptant de payer la moitié de la facture de 400 millions de dollars pour la construction de l'édifice.

La commission parlementaire sur ce projet de loi amorcera ses travaux aujourd'hui avec la participation, entre autres, de M. Labeaume, de Pierre Karl Péladeau et de l'ex-directeur général de la Ville de Québec, Denis de Belleval, qui a présenté mardi une requête pour faire annuler l'entente. Le maire a fait savoir hier qu'il limitera ses déclarations devant les parlementaires en raison de la requête de M. de Belleval.

Officiellement, les libéraux ont le même point de vue sur le projet de loi. Ils veulent que le débat se tienne en commission et que le maire puisse répondre aux questions sur l'entente, conclue de gré à gré avec Quebecor et non à la suite d'un appel d'offres.

Ils envoient toutefois des messages contradictoires sur le sort qui sera réservé au projet de loi 204. La semaine dernière, une source haut placée au gouvernement a fait valoir que les dispositions du projet de loi doivent être adoptées «le plus tôt possible», avant l'ajournement des travaux parlementaires, le 10 juin, comme le souhaite le maire. Elle a ajouté que le gouvernement avait un plan B pour s'assurer d'atteindre cet objectif et contourner le veto du député de Québec solidaire, Amir Khadir. Les dispositions du projet de loi seraient intégrées à un projet omnibus dont l'adoption ne dépend pas du consentement de tous les députés.

Or, le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, a lui-même refusé d'amender le projet omnibus  pour y intégrer le projet de loi du maire Labeaume, parce que ses juristes remettent en question la légalité de l'accord. Et vendredi, à RDI, le ministre Pierre Moreau a tenu un autre discours sur la position gouvernementale: «S'il n'y a pas d'assentiment» pour procéder au vote sur l'adoption du projet de loi 204, celui-ci «pourrait être adopté à une autre session», en septembre.

Libéraux indisposés

Le maire a indisposé des libéraux dès le début de février, lorsque Le Soleil a révélé que l'amphithéâtre serait construit sans apport financier du privé ni du fédéral, mais plutôt grâce à un appui important du gouvernement du Québec. Le député de Vanier, Patrick Huot, a manifesté son mécontentement à un membre de son entourage dans un courriel aux propos vulgaires.

«Hostie qu'on est des mauvais gestionnaires! On avait baissé nos culottes, maintenant on écarte les fesses!» a-t-il écrit le 9 février. Le lendemain, le gouvernement Charest a confirmé qu'il paierait 50% de la construction jusqu'à concurrence de 200 millions. Malgré ce qu'il a dit en privé, Patrick Huot - ancien conseiller municipal - s'est dit «très heureux» de participer à l'annonce. L'amphithéâtre sera construit à côté de sa circonscription.

Pour expliquer son courriel du 9 février, le député a soutenu hier qu'il avait toujours voulu que le gouvernement devienne copropriétaire de l'amphithéâtre en raison des sommes investies, mais qu'on lui a répondu que ce n'était pas possible. Il n'a pas voulu se prononcer sur le projet de loi 204. «La loi est-elle nécessaire? Je ne sais pas. Que Quebecor soit gestionnaire d'un édifice comme ça, c'est le gros bon sens. Mais sur la façon dont ça s'est fait, je n'ai pas la spécialité pour dire si tout est légal ou pas.»

Des arguments utilisés par Régis Labeaume dérangent également les libéraux. Le 20 mai, le maire a affirmé au quotidien Le Soleil que le projet d'amphithéâtre tombera à l'eau si le projet de loi 204 n'est pas adopté ce printemps.

Le ministre responsable de Québec, Sam Hamad, a répliqué hier que la construction de l'édifice n'est pas conditionnelle à l'adoption du projet de loi. «La loi touche le contrat de gestion. Ça ne touche pas la construction. Ce sont deux choses différentes», a-t-il martelé.

Raymond Bernier, député de Montmorency - aussi dans la région de Québec -, a indiqué qu'il n'avait jamais été question que la construction de l'amphithéâtre dépende des négociations sur la gestion de l'édifice ou de l'obtention d'une franchise de la Ligue nationale de hockey. C'est pourtant ce que prétend Régis Labeaume aujourd'hui.

Officiellement, le PQ approuve l'entente et le projet de loi qui a été déposé par Agnès Maltais. Mais en réunion, des députés comme Pierre Curzi ont manifesté leur profond malaise.