Alors que Québec veut accueillir moins d'immigrants, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) propose exactement le contraire.

«On suggère d'en accueillir environ 65 000 par année», a affirmé son président, Michel Leblanc, ce matin lors des consultations sur le plan d'immigration de 2012-2015 (mémoire disponible ici).

L'année dernière, Québec en avait accueilli 54 000. Le même nombre est prévu pour cette année. Mais la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Kathleen Weil, veut «diminuer légèrement» la cible, à 50 000, pour les trois prochaines années.

Cela envoie «un signal de frilosité» sur le marché de l'immigration internationale, déplore M. Leblanc. Selon lui, Québec devrait au contraire essayer d'attirer plus de cerveaux.

Le Parti québécois et l'Action démocratique du Québec ont déjà suggéré de diminuer l'immigration. L'ADQ voudrait revenir au seuil de 2006, soit 45 000 immigrants. Même si la CCMM reconnaît que sa proposition est à contre-courant, elle dit ne pas être seule dans son coin. «On est seulement les premiers à se mouiller publiquement», dit M. Leblanc.

Il soutient que sa cible n'est pas exagérée. En vertu d'une entente conclue en 1991, Québec peut recevoir une plus grande proportion d'immigrants que la moyenne canadienne. La proportion d'immigrants que Québec accueille peut dépasser de 5% son poids démographique dans la fédération.

Québec compte pour 23% de la population canadienne. Elle pourrait donc recevoir 28% de l'immigration canadienne chaque année. Or, elle en reçoit beaucoup moins. La part de l'immigration québécoise «oscille entre 12% et 22%» depuis quelques années, rapporte M. Leblanc.

Cela poserait problème, d'autant plus que le poids du Québec dans le Canada diminue déjà. Mais s'il faut augmenter l'immigration, c'est surtout pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre et s'attaquer au vieillissement de la population, croit M. Leblanc. Deux arguments qui avaient été contestés l'hiver dernier dans l'essai Le remède imaginaire.

Même si elle propose d'augmenter l'immigration, la CCMM estime que l'intégration des nouveaux arrivants est déficiente. Elle assure que cela n'est pas contradictoire.

«On doit faire les deux en même temps, explique M. Leblanc. On pense qu'on a la compétence nécessaire, s'y on s'y attelle».

Il se désole du taux élevé de chômage chez les immigrants au Québec. Ce taux est moins élevé dans les autres provinces.

Pour favoriser l'intégration, il suggère entre autres de modifier la grille d'évaluation des immigrants. Il faudrait prioriser davantage les jeunes de 30 ans et moins, les professionnels en demande ainsi que la catégorie «affaires».

La CCMM souhaite aussi bonifier les programmes de mentorat, mettre en relation les entreprises avec les immigrants chômeurs et reconnaître davantage leurs compétences.

Avant tout, mieux intégrer, dit la FTQ

La FTQ ne prend pas position sur le nombre d'immigrants. Elle se préoccupe avant tout de leur intégration. Son président Michel Arsenault souhaite que les divers ordres professionnels reconnaissent davantage les formations des nouveaux arrivants. «Moi, je suis technicien électricien de métier. J'ai récemment pris un taxi avec un chauffeur d'origine égyptienne. Il me disait qu'il était électricien de formation. J'ai testé ses connaissances, et il savait de quoi il parlait», raconte-t-il.

M. Arsenault reconnaît les efforts du gouvernement en francisation. «Mais on pourrait faire encore plus», estime-t-il. Il appuie la proposition du Conseil supérieur de la langue française, qui voudrait rendre gratuit les cours de français (mémoire du CSLF déposé à la ministre de l'Immigration disponible ici).

La FTQ souhaite aussi renforcer la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi. Cette loi favorise l'embauche de minorités visibles par le gouvernement. Mais elle «n'apporte pas les résultats escomptés», notamment à cause de l'attrition. La FTQ veut donc en élargir le mandat et y assujettir toutes les entreprises qui transigent avec le gouvernement.

Enfin, M. Arsenault propose d'encourager l'immigration dans les régions. Le Plan Nord constituerait une bonne opportunité à cet égard. «J'ai déjà vécu à Sept-Îles, où il y a eu une vague d'immigration italienne dans les années 50. Leur intégration a été exemplaire. C'est possible de réussir.»

Sélection inadéquate, selon les PME

La Fédération canadienne des entreprises indépendantes dénonce «l'inadéquation» entre les critères de sélection des immigrants et les besoins en main-d'oeuvre du Québec.

Elle est d'accord pour qu'on maintienne à 65% la part de l'immigration économique. Mais elle souhaite qu'on change la grille de sélection pour arrimer l'immigration aux besoins du marché de l'emploi.

Selon un sondage interne, 42% des PME québécoises ressentent la pénurie dans les professions exigeant des compétences techniques et spécialisées.

La ministre Weil doit déposer sa politique d'immigration en octobre.