Dans sa dernière intervention comme chef de l'ADQ, Gerard Deltell a tenu à répliquer à la chef péquiste Pauline Marois, qui jugeait bien famélique la participation des militants adéquistes au vote entérinant la fusion de son parti et de la Coalition avenir Québec.

Plus tôt, cette fusion était entérinée à 70,48% des suffrages exprimés. Mais seulement 54,46% des 2521 membres toujours formellement inscrits à l'ancien parti de Mario Dumont ont participé à l'exercice, du 9 au 19 janvier.

Mme Marois devrait «s'occuper de qui se passe dans son parti. Ce que je vois à l'Assemblée nationale, c'est qu'on a plus d'opposition officielle. L'opposition se fait elle-même l'opposition. Le PQ est sa propre opposition! Cela n'a pas de bon sens. Tous les deux mois, il y a une crise existentielle, les Québécois ont le droit d'avoir une opposition à l'Assemblée nationale», a lancé M. Deltell.

La CAQ toujours pas à l'Assemblée nationale

En point de presse à Montréal, Mme Marois avait relevé la faible participation au vote qui mettait fin à l'ADQ, dix-huit ans après sa fondation. «C'est un très petit pourcentage, 50% de 2500 personnes, cela ne fait pas un très grand nombre d'appuis pour un nouveau parti», a-t-elle soutenu.

Pour l'heure, pas question de s'engager à reconnaître la nouvelle formation à l'Assemblée nationale -une décision qui relèvera du Président, Jacques Chagnon. Un parti doit avoir 12 députés ou obtenu 20 % des suffrages à une élection, mais, en 2008, l'Assemblée nationale avait fait exception pour les sept députés adéquistes qui avaient survécu à l'élection. Avec neuf députés, la Coalition ne remplit pas les critères pour la reconnaissance d'un parti à l'Assemblée nationale, a signalé Mme Marois, laissant prévoir des discussions musclées entre les partis.

Les adéquistes s'attendaient à la fusion

M. Deltell se disait surtout heureux que «tous les membres (du parti) aient eu le privilège de se prononcer». La faible participation le déçoit, mais il l'explique par le fait que bien des membres s'attendaient depuis longtemps à ce que la fusion se fasse. Il convie les adversaires de la fusion à se rallier, «nos convictions sont toujours là, dans la coalition». Cette fusion «n'a pas été un travail facile, mais nous devons regarder, agir vers l'avenir. On devait fusionner, travailler ensemble pour proposer une solution réaliste et responsable aux Québécois».

En tout, 1373 membres de l'ADQ ont participé au vote. De ce nombre, 35 bulletins de vote ont dû être rejetés. Sur les 1338 bulletins de vote valides, 943 membres ont dit oui, 388 ont dit non et sept ont annulé leur vote. La surveillance du scrutin avait été confiée à la maison Raymond Chabot Grant Thorton.

Déjà, l'exécutif du parti, à la mi-décembre, s'était prononcé clairement en faveur de cette alliance, approuvée par 27 des 32 membres de la direction du parti. L'éminence grise de l'ADQ, Me Jean Allaire, avait pris fait et cause en faveur de la fusion de l'ADQ au nouveau parti de François Legault. Mais une aile plus radicale de l'ADQ s'était élevée contre la fusion, un mouvement incarné par Claude Garcia, l'ancien patron de la Standard Life, devenu le président de la commission politique à l'ADQ.

Dès mercredi, François Legault assistera au premier caucus de l'aile parlementaire de son parti, qui compte neuf élus à l'Assemblée nationale, quatre adéquistes, trois ex-péquistes et deux anciens adéquistes indépendants depuis deux ans.

Pas question de rallier la CAQ

Pour Denis Claveau, président sortant de l'aile jeunesse de l'ADQ et clairement engagé contre la fusion, «le résultat du vote est assez clair». Pour lui «la participation montre que c'était mitigé, les gens étaient désabusés», souligne-t-il. Pas question de créer un nouveau parti, pas question pour lui, ni pour la majorité des 388 opposants, prédit-il, de rallier la CAQ.

«La plupart des gens qui ont voté contre, ne se rallieront pas. On ne part pas d'un parti de droite pour se rallier à un parti social démocrate», résume-t-il.

Pour lui, le vote a été réalisé selon les règles, mais les adversaires partaient de loin, sans aucun appui dans la direction de l'ADQ.

Actif sur les médias sociaux, le comité Restons ADQ a concédé la victoire «aux tenants de la prise de contrôle de l'ADQ par la CAQ» avant même l'annonce des résultats du vote. Selon eux, la voix de ceux qui sont à la droite du centre reste puissante. «Il n'y a jamais eu autant d'activités de la droite, que ce soit sur le plan des publications, des médias ou des rassemblements», a affirmé Adrien Pouliot, vice-président de la Commission politique de l'ADQ et membre du Comité Restons ADQ.

«Ce que nous avons à faire, maintenant que les tenants de la gauche efficace de François Legault ont réussi à éliminer l'ADQ, c'est de travailler à consolider la voix de la droite. Il faut voir la situation actuelle comme une occasion unique de rassembler tous ceux qui croient à la réduction de la taille de l'État, au libre marché et à la responsabilité individuelle», a renchéri Claude Garcia, président de la Commission politique de l'ADQ et membre du Comité Restons ADQ.