L'inquiétude gagne les rangs de la Coalition avenir Québec (CAQ) après que son financement a été passé au crible. Et le silence du chef François Legault fait des mécontents.

Jeudi après-midi, la CAQ a présenté ses excuses pour avoir diffusé une liste de ses donateurs comportant des erreurs. «Dans toute cette aventure-là, où on crée quelque chose (la CAQ), il va y avoir des coches mal taillées et il faut être capable de faire face à la musique. Manifestement, c'est arrivé. On s'en désole, on s'en excuse. On va faire les correctifs», a affirmé le principal conseiller de M. Legault, Martin Koskinen, qui prend «l'entière responsabilité» de ce «cafouillage». Pas question de «blâmer ou d'humilier qui que ce soit; ce sont des bénévoles qui sont là pour les bonnes raisons», ajoute-t-il.

M. Legault, qui a été silencieux cette semaine, fera «probablement» un point de presse ce matin à Montréal, indique M. Koskinen.

La CAQ a diffusé lundi une liste comprenant les noms de quelque 1000 citoyens qui ont versé au total 315 000$ à la CAQ de février à la mi-novembre 2011, au moment où elle était un organisme à but non lucratif (OBNL).

La Presse a révélé jeudi que deux Montréalais, Winston Chan et Martin Cossette, se trouvent dans cette liste alors qu'ils jurent ne pas avoir donné un sou à la CAQ.

Selon Martin Koskinen, une liste d'invitations à un cocktail de financement sur laquelle figuraient les noms de MM. Chan et Cossette a été «fusionnée» avec celle des donateurs. «Un montant de 250$ a été accolé [à leur nom], alors que ça n'aurait pas dû l'être», a-t-il ajouté.

Ce sont des «erreurs administratives», faites «de bonne foi», souligne-t-il. «On ne serait pas assez fous pour jouer dans des histoires de prête-noms et commencer à inventer des noms pour placer des montants», a lancé Martin Koskinen.

La CAQ a diffusé deux versions de sa liste de donateurs, et il existe des différences entre les deux quant aux sommes versées par certains de ces contributeurs.

Le parti reprendra donc «de A à Z» la vérification des dons reçus, et une nouvelle liste sera publiée. Martin Koskinen a souligné que la CAQ a voulu faire preuve de transparence en rendant cette liste publique, même si aucune loi n'oblige un OBNL à le faire. La CAQ s'est également imposé les mêmes règles de financement que les partis politiques.

Plus tôt cette semaine, La Presse a signalé que pas moins de 46 avocats du bureau BCF, à Montréal, ont donné au total 20 000$ à la CAQ du 14 novembre au 31 décembre 2011 au moment où elle était devenue un parti politique. Le patron de ce bureau est Mario Charpentier, le nouveau responsable du financement de la CAQ. Par ailleurs, au moins 14 employés d'Ernst&Young ont versé plus de 10 000$ à l'OBNL, toujours selon les informations colligées par La Presse.

Tous ces reportages sèment le «désarroi» à l'interne, a confié un acteur influent de la CAQ, qui reconnaît «un problème de perception».

Certains caquistes ne sont pas insensibles aux attaques des libéraux, qui accusent leur parti de violer l'esprit de la loi électorale. Certains donateurs ont pu verser plus de 1000$ au cours de l'année 2011, une fois à l'OBNL et une autre fois au parti politique.

François Legault, qui s'était fixé de hautes normes éthiques, n'aurait pas dû prêter flanc à ce genre de critiques, a-t-on dit sous le couvert de l'anonymat.

Une autre source à la CAQ affirme que les sorties maladroites du député François Rebello et les histoires sur le financement sont «deux éléments négatifs de suite» qui risquent d'avoir un impact sur l'opinion publique. «Il y a un niveau de consternation générale», a-t-elle dit.

Et le silence du chef alimente aussi ce climat d'inquiétude. «Quand quelqu'un se fait attaquer et ne se défend pas, c'est l'attaquant qui gagne», a-t-on résumé.

Du côté du PQ, on est passé à l'attaque jeudi sur les bavures dans le financement de la CAQ. «Ça commence à faire beaucoup. Au nom de la transparence, François Legault aurait intérêt à sortir de son mutisme et à aller s'expliquer publiquement. En agissant de la sorte, l'impression qui se dégage, c'est qu'il a quelque chose à cacher aux Québécois. Toutes ces révélations nous laissent croire qu'il y a un système organisé de financement non éthique à la CAQ et que son chef se lie les mains avec des groupes d'intérêts et des collecteurs de fonds», soutient le président du PQ, Raymond Archambault.