La Coalition avenir Québec (CAQ) ne sera pas reconnue comme formation politique sur le parquet de l'Assemblée nationale. Technique en apparence, cette décision du président Jacques Chagnon aura des conséquences importantes sur le nouveau parti.

Selon les informations obtenues par La Presse, libéraux et péquistes n'ont pas voulu céder d'un pouce pour que les neuf députés regroupés sous la CAQ disposent de plus de visibilité que neuf élus «indépendants». Forcé d'appliquer les articles 13, 14 et 15 du règlement de l'Assemblée, le président Chagnon n'avait aucune possibilité de reconnaître un groupe qui compte moins de 12 élus ou qui n'a pas obtenu, comme parti, 20% des suffrages aux dernières élections. Le chef de l'ex-Action démocratique du Québec, Gérard Deltell, a dîné avec M. Chagnon la semaine dernière au Ferreira, dans une dernière tentative pour plaider la cause de la CAQ.

Fini l'entente spéciale

Chez les leaders parlementaires du Parti libéral et du Parti québécois, Jean-Marc Fournier et Stéphane Bédard, on n'a pas voulu prolonger l'entente spéciale par laquelle les sept députés élus sous la bannière adéquiste en 2008 avaient été reconnus comme parti politique à l'Assemblée. Le directeur général des élections a par ailleurs officialisé la fusion de la CAQ et de l'ADQ à partir d'aujourd'hui, après avoir reçu officiellement la demande. Avec cette décision, l'allocation annuelle de 799 000$ obtenue par l'ADQ sur la base du suffrage exprimé le 8 décembre 2008 sera désormais versée à la CAQ. En retour, la CAQ prendra en charge la dette de l'ADQ et de ses instances, laquelle totalisait 886 000$ à la fin de 2010, indique le DGE.

Nombre et ordre des questions

Les neuf «indépendants» de la CAQ auront droit, grosso modo, à une question par séance de l'Assemblée nationale. Il restait à définir le moment où ils pourront intervenir durant la période quotidienne des questions - les questions en toute fin de séance soulèvent toujours moins d'attention. Il faudra tenir compte aussi de l'autre «indépendant», Amir Khadir, ce qui laissait présager qu'en fait, neuf questions sur huit séances viendraient du groupe des «indépendants» - Louise Beaudoin, Lisette Lapointe et Pierre Curzi font aussi partie de ce groupe.

«Les deux partis ont promis qu'ils ne restreindraient pas notre droit de parole», indique Sylvie Roy, députée de la CAQ. Pour elle, le droit de parole, c'est une chose, «mais encore faudra-t-il avoir des choses à dire».

Or, les conséquences de la non-reconnaissance de la CAQ frappent de plein fouet l'organisation de la formation politique. Une petite équipe de recherchistes et d'attachés de presse alimentaient les élus adéquistes pour les questions. Avec la perte du statut de parti reconnu, les budgets de recherche s'envolent aussi. On passera de 700 000$ à 200 000$ environ; chacun des neuf élus aura droit à un budget de recherche de 22 700$. Dans l'entente sur la fusion entre l'ADQ et la CAQ, François Legault s'était engagé toutefois à maintenir tout le monde en poste - les salaires seront versés par le parti.

Pour les officiers adéquistes Gérard Deltell et Sylvie Roy, la non-reconnaissance coûte cher. M. Deltell perd son indemnité de chef de parti, de 29 000$ par année, et Mme Roy, celle de leader parlementaire, de 21 000$.

Leur masse salariale spéciale - deux décisions plus récentes du bureau de l'Assemblée nationale - est aussi amputée de 327 000$ pour le chef et de 243 000$ pour l'ex-leader parlementaire.