La fin des querelles au Parti québécois (PQ), un conseil national sans histoire et un coup de barre à gauche portent leurs fruits pour Pauline Marois. Le PQ fait un «bond spectaculaire» dans le coeur des électeurs. En prime, la chef péquiste rejoint ses adversaires, rétablie tout à coup parmi les candidats au poste de premier ministre.

Selon le plus récent sondage CROP, c'est la fin de la traversée du désert qui a commencé en juin 2011 avec les démissions fracassantes de Pierre Curzi, Louise Beaudoin et Lisette Lapointe.

L'enquête réalisée pour La Presse auprès de 1000 internautes, du 17 au 21 février, constate une forte hausse du Parti québécois, qui passe en un mois de 21 à 30% des intentions de vote.

La Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault poursuit sa descente aux enfers. Le nouveau parti arrive désormais troisième; il est passé de 31 à 26%, une très claire tendance à la baisse entamée depuis décembre dernier. Selon Youri Rivest, vice-président de CROP, le parti de M. Legault a eu «un manque de cohésion dans le message, il y a un flottement. Le chef incarne toujours le changement, mais les gens se demandent quel changement il propose». Au cours des derniers jours, des erreurs stratégiques ont plombé davantage un parti qui était déjà en chute. «La CAQ avait jusqu'ici courtisé tous ceux qui veulent du changement, elle doit les partager désormais avec le PQ», explique M. Rivest.

Québec solidaire cède quant à lui trois points, de 11 à 8% des intentions de vote. L'enquête a été menée peu après l'annonce de Mme Marois d'abolir la cotisation santé universelle de 200$ pour refiler la facture aux plus fortunés. «Elle est retombée sur ses pattes et a retrouvé son fonds de commerce, la gauche et les souverainistes», souligne l'expert, qui rappelle les annonces de la chef péquiste visant à rassurer ses militants les plus souverainistes.

Rien ne bouge du côté libéral: le parti de Jean Charest récolte 29% des intentions de vote, le même score qu'en janvier. L'insatisfaction à l'égard du gouvernement ne bronche pas davantage, en dépit de la multiplication des annonces gouvernementales - on constate toujours 70% d'électeurs insatisfaits, autant qu'en janvier.

Selon Youri Rivest, des élections cette semaine auraient donné «un gouvernement probablement péquiste, mais certainement minoritaire». La remontée de Mme Marois est «spectaculaire», insiste-t-il, relevant que son parti et elle ont désormais retrouvé les niveaux d'appuis de mai 2011, avant la série de démissions dans le caucus péquiste. Avec de tels chiffres, le premier ministre Charest «serait très téméraire» s'il engageait ses troupes en campagne électorale; en 2007, Jean Charest avait failli perdre le pouvoir et s'était retrouvé minoritaire, alors qu'il n'y avait que 53% d'insatisfaits.

L'écart d'un point seulement entre libéraux et péquistes est trompeur. Les électeurs francophones décident du sort d'une centaine de circonscriptions sur 125; or ils votent à 36% pour le PQ. La CAQ obtient 31% d'appuis chez les francophones et les libéraux arrivent très loin derrière avec 18%.

Mauvaise direction

Autre voyant rouge au tableau de bord de Jean Charest, une très forte majorité des électeurs, 65% contre 35%, estiment que le Québec «va dans la mauvaise direction». «C'est une mesure du désir de changement, et ce souhait est toujours aussi clair chez les électeurs», observe M. Rivest.

Le sondage ne comporte pas de surprises dans les régions. La CAQ domine dans la région de Québec avec 40% d'appuis, mais son étoile pâlit à Montréal avec seulement 22% d'intentions de vote. «Le parti peine à s'implanter dans l'île de Montréal et a un problème avec les anglophones», soulève M. Rivest. Le Parti libéral (PLQ) fait recette à Montréal avec 37% d'appuis contre 26% pour le PQ. Dans les autres régions, toutefois, le PQ caracole en avant, avec 35% d'intentions de vote, suivi de loin par la CAQ avec 28%. Un peu plus d'un électeur sur cinq - 22% - vote libéral en région.

CROP a une autre bonne nouvelle pour Mme Marois. «L'enthousiasme envers Pauline Marois a augmenté considérablement en février», souligne Youri Rivest. Depuis des mois, on assistait à un duel entre Jean Charest et François Legault quand on demandait aux Québécois qui ferait le «meilleur premier ministre». En février, Mme Marois fait subitement son entrée dans l'équation.

Il y a un mois, 11% des gens pensaient qu'elle était la meilleure candidate au poste de premier ministre. Ils sont désormais 19%. Elle talonne  MM. Charest et Legault, au coude à coude avec 21% de supporteurs. Jean Charest a gagné deux points et François Legault en a cédé autant au cours du dernier mois.