Brandissant un rapport sur les dons politiques des employés et dirigeants de la firme de génie Roche, Québec solidaire a accusé lundi le gouvernement Charest d'avoir mobilisé la police et le système judiciaire pour livrer une guerre aux étudiants plutôt qu'une guerre à la corruption.

Le parti a dévoilé une mise à jour d'un précédent rapport de recherche qu'il a préparé sur les contributions politiques du personnel de la firme de génie-conseil. Il y voit un exemple de «copinage» entre le pouvoir politique et les firmes qui récoltent des contrats publics.

Québec solidaire travaille sur d'autres cas d'entreprises, mais a choisi de divulguer tout de suite les données sur Roche après qu'un ancien consultant de la firme ait raconté à l'émission Enquête avoir trouvé des centaines de prêtes-noms pour financer des partis politiques.

«C'est une petite partie d'un rapport qui sera notre contribution à la Commission Charbonneau», a expliqué Françoise David, présidente du parti.

Selon les chiffres de QS, les gens reliés à Roche a donné plus de 370 000 $ au PLQ et, dans une moindre mesure, au PQ et à l'ADQ entre 2000 et 2011.

Le PLQ remporte la part du lion, avec 282 820 $, contre 81 160 $ pour le PQ et 6 590 $ pour l'ADQ. Il s'agit des dons que QS a pu relier aux gens de chez Roche, sans connaître l'identité de chaque employé, de leurs conjointes ou de leurs enfants.

Les dons ont chuté radicalement en 2010 et 2011, probablement en raison de l'abaissement de la limite légale et des nombreux reportages sur le financement des partis, croit le député Amir Khadir. Mais il y voit encore une tendance qu'il ne croit pas reliée aux convictions politiques. Certains cadres donnent d'ailleurs à plusieurs partis à la fois.

«Le système semble toujours en place et avec force», observe M. Khadir.

«Cette culture de la corruption qui s'est installée dans les appareils des vieux partis est une culture qui nous coûte très cher», dit-il.

Le député blâme sévèrement le gouvernement, qu'il accuse de se traîner les pieds lorsqu'il s'agit de combattre cette «culture instaurée par le milieu des affaires», selon lui.

«Notre gouvernement a mobilisé les forces policières et judiciaires pour mener une véritable guerre au mouvement étudiant et à la jeunesse qui est notre avenir. Il serait mieux de mener une guerre à la corruption», a-t-il lancé, en déplorant le piétinement de certains dossiers.

Le porte-parole de Roche, Jacques Thivierge, s'est fait avare de commentaires puisque deux de ses employés sont toujours accusés criminellement à la suite d'une enquête de l'Escouade Marteau sur le contrat de l'usine d'épuration de Boisbriand.

«Toutes les allégations concernant ces éléments de collusion, corruption, fausses factures, c'est devant la cour. Nos employés ont plaidé non-coupable, ils ont droit à un procès. Les deux sont non-coupables, ils travaillent toujours. Ce n'est pas une chose facile, du point de vue humain. Les gens qui connaissent France Michaud et Gaëtan Morin sont très attristés de ce qu'ils vivent présentement», explique M. Thivierge.

Il assure toutefois que Roche n'a «asbolument pas» de politique d'entreprise en matière de financement politique. «La loi est claire au Québec. Seuls les électeurs peuvent faire des dons. Les entreprises ne peuvent pas faire de dons», dit-il.