Depuis quelques semaines, le Canada semble sur une planète à part, la planète A (H1N1). Sauf peut-être en Ukraine, la nouvelle pandémie ne semble pas trouver d'échos aussi forts ailleurs qu'ici.

Pas une journée ne s'écoule sans que des critiques se fassent entendre. Le gouvernement fédéral et les provinces sont accusés d'avoir crié au loup, d'avoir mal orchestré la campagne de vaccination, d'avoir mal géré les communications.

 

Sans compter les personnes âgées qui accusent maintenant Québec de vouloir les sacrifier, et des infirmières, en colère contre le ministre de la Santé, Yves Bolduc, pour des propos qu'il a tenus à leur endroit.

Petite consolation, deux sondages récents (Ekos et Harris Decima) indiquent que la population canadienne semble satisfaite du gouvernement pour sa gestion de la crise.

Une forte proportion de répondants considèrent que le gouvernement a fait un bon travail jusqu'à maintenant. Dans les deux sondages, c'est au Québec que le taux de satisfaction est le plus élevé.

La grippe A (H1N1) se vit en accéléré au Québec. Il y a un mois, une majorité de Québécois ne voulaient pas se faire vacciner. Puis, l'arrivée de doses en quantité limitée et surtout, le décès de trois jeunes en Ontario, ont causé un petit vent de panique. C'était à qui se ferait vacciner en premier. Un mouvement qui semble s'apaiser depuis quelques jours.

Ces réactions épidermiques n'étonnent pas le Dr Brian Ward, directeur adjoint du Centre de recherche en maladies infectieuses et microbiologie du Centre universitaire de santé McGill.

«C'est la première fois qu'on a une pandémie qui se vit en temps réel et devant public», souligne le Dr Ward.

La population peut voir chaque jour, en direct, le directeur national de la santé publique et le ministre de la Santé, annoncer les directives et justifier leurs décisions.

Les recommandations changent constamment. Ce qui était vrai hier ne l'est plus aujourd'hui, ce qui entraîne forcément une confusion et une nervosité dans la population.

Il n'y a qu'à penser au calendrier de vaccination et aux populations visées qui varient constamment selon les régions et les arrivages de vaccins.

«Ce qui se passe est tout à fait normal, vu la rapidité de croissance de nos connaissances sur ce virus. C'est évident qu'on doit changer les recommandations d'un jour à l'autre», explique le Dr Ward.

Le Québec n'est pas pire que les autres, au contraire. L'Alberta a dû fermer des centres, faute de vaccins. L'Ontario a aussi été confronté à une pénurie et une ruée vers ses centres de vaccination.

Par ailleurs, le scénario catastrophe n'a pas eu lieu. Le virus s'est avéré à ce jour moins virulent que ce que les experts craignaient au printemps, quand la pandémie a commencé.

C'est une bonne chose, souligne le Dr Eric Frost, professeur en microbiologie et infectiologie à l'Université de Sherbrooke. «Heureusement, car nous avons encore besoin d'ajuster le tir. C'est normal, on apprend de nos erreurs.»

Le sondage Ekos démontre que plus de la moitié des Canadiens estime que l'inquiétude de la population au sujet du virus a été «exagérée». Selon le sondage Harris Decima, de la Presse Canadienne, les deux tiers des répondants considèrent que les médias en ont trop fait.

Vrai, la grippe A (H1N1) fait la manchette des journaux, ouvre les bulletins de nouvelles à la télé et la radio, en plus d'alimenter les chaînes continues toute la journée. Bref, le sujet est omniprésent.

Mais il ne faudrait pas oublier que des conférences de presse sont organisées quotidiennement, que l'information change constamment et que des précisions supplémentaires sont sans cesse apportées.

Les médias sont nombreux à couvrir le sujet. Mais ils sont aussi nombreux à poser des questions et à dénoncer des ratés. On peut penser que cette omniprésence a permis de faire bouger les choses rapidement pour que les parents n'aient plus à attendre en file pendant des heures pour faire vacciner leurs enfants.