Pour Jean Charest, qui a fait de ce dossier un de ses principaux chevaux de bataille, il s'agit d'une «étape majeure». C'est en effet un gros morceau qui vient de passer.

Vendredi à Paris, les ordres professionnels de quatre secteurs de la santé ont signé des ententes qui permettront à leurs membres de pratiquer librement leur métier au Québec et en France. Les médecins, les dentistes, les pharmaciens et les sages-femmes sont concernés, chaque territoire leur ouvrant désormais les portes et les bras. Les infirmières se sont de leur côté engagées à conclure un accord d'ici six mois.

Ces «arrangement de reconnaissance mutuelle» des qualifications et des diplômes s'inscrivent dans le cadre du chantier inauguré à Québec l'année dernière par le premier ministre Charest et le président Nicolas Sarkozy pour favoriser la mobilité professionnelle.

Exactement 22 ententes - sur une centaine attendues - ont été signées jusqu'ici, mais celles-là comptaient parmi les plus problématiques, notamment parce qu'elles concernent à la fois la «protection du public» et des «chasses très bien gardées», comme le fait remarquer l'entourage du premier ministre.

On comprend donc que Jean Charest, qui a entamé vendredi matin une visite de trois jours en France, ait tenu à assister aux signatures, aux côtés de la ministre française de la Santé, Roselyne Bachelot.

«Nous dessinons l'avenir. Nous sommes en train de créer un nouvel espace de mobilité, de liberté et d'épanouissement, un nouvel espace de vie», a lancé le premier ministre.

Reste à voir combien de professionnels vont en profiter, dans un sens ou dans l'autre. Si les infirmières «sont très attendues», comme l'a dit M. Charest, on ne sait pas encore l'ampleur des inévitables mouvements que ces «arrangements» pourraient entraîner, particulièrement chez les médecins.

«On n'en a aucune idée, l'expérience va nous le dire, explique le vice-président du Collège des médecins, Charles Bernard. Aucune statistique n'a été faite. Il y a sûrement des médecins québécois qui veulent aller pratiquer en France. Beaucoup de médecins français ont exprimé le désir de venir au Québec. On est en pénurie. Si on peut enrichir la profession, tant mieux.»

La ministre Bachelot a toutefois écarté du revers de la main la «crainte - un peu fantasmatique - pour chaque pays de voir partir ses professionnels de la santé à l'étranger», d'autant que la France et le Québec «présentent des niveaux de vie sensiblement équivalents».

«Les flux prévisibles entre la France et le Québec seront vraisemblablement équilibrés, a-t-elle prédit. L'entente viendra mieux réguler et accompagner un mouvement naturel qui est déjà une réalité.»

Parmi les professions et les métiers ayant déjà conclu des «arrangements de reconnaissance mutuelle» conclus jusqu'ici, on trouve aussi bien des avocats, des comptables que des briqueteurs-maçons ou des peintres. Mais au final, plus de la moitié des professions concernées par l'entente sur la mobilité relèveront du secteur de la santé.

Le premier ministre Charest estime que toute l'affaire sera pesée et emballée dans un an, de manière à ce qu'elle connaisse sa «conclusion ultime» à l'automne 2010. Juste à temps pour sa prochaine visite officielle en France, dans le cadre des «rencontres alternées» des premiers ministres québécois et français.