Le gouvernement annoncera au printemps qu'il va de l'avant avec un programme de dépistage prénatal du syndrome de Down, comme l'a recommandé le commissaire à la santé et au bien-être il y a plus d'un an.

Mais pendant que Québec réfléchit toujours au déploiement des tests, une véritable bataille se livre dans les coulisses, a appris La Presse.

D'un côté, la Coalition contre la mise en oeuvre d'un programme public de dépistage prénatal de la trisomie 21 multiplie les interventions auprès des députés.

De l'autre, les médecins accoucheurs sont inquiets. Malgré leurs demandes pressantes et répétées, rien n'a encore été fait pour s'assurer qu'on aura les ressources nécessaires à la mise en place et au contrôle de qualité des tests de dépistage.

«On ne sait plus à quelle porte cogner pour se faire entendre», déclare la Dre Corinne Leclercq, présidente de l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec. Elle s'apprête d'ailleurs à écrire au ministre de la Santé, Yves Bolduc, pour sonner l'alarme.

«Ça fait tellement longtemps qu'on demande l'implantation d'un tel programme, on ne veut pas mettre de bâtons dans les roues. Mais d'un autre côté, il ne faut surtout pas se tromper», dit la Dre Leclercq.

Selon nos sources, le programme de dépistage du syndrome de Down comprendrait une échographie de datation et une analyse sanguine au début de la grossesse, suivies d'une autre analyse de sang entre la 14e et la 18e semaine de grossesse.

Actuellement, les hôpitaux sont déjà débordés avec les échographies qui sont faites systématiquement autour de la 20e semaine de grossesse. Il faudra aussi plus d'infirmières pour procéder aux prises de sang.

Les médecins craignent également d'être submergés. Ils devront être en mesure d'informer adéquatement les parents sur les tests de dépistage, mais aussi les guider et les diriger vers les ressources appropriées si le test est positif.

«Que va-t-on faire si les résultats qui nous reviennent sont anormaux ? Comment s'assurer du contrôle de qualité des résultats ?» demande la Dre Leclercq.

Seules les cliniques privées et certains hôpitaux offrent actuellement un dépistage de la trisomie 21. De 10 à 15 % des couples y ont recours, estime la présidente de l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec.

Qu'en sera-t-il lorsque le programme sera offert gratuitement à tous les couples compte tenu qu'il y a plus de 80 000 naissances au Québec chaque année ?

Pour le moment, le gouvernement reste coi sur cette question. «Nous irons de l'avant ce printemps, mais les détails entourant le programme seront dévoilés en temps opportun», indique la porte-parole au ministère de la Santé et des Services sociaux, Dominique Breton.

Pendant ce temps, la Coalition contre la mise en oeuvre d'un programme public de dépistage de la trisomie 21 poursuit sa campagne et multiplie les lettres aux élus afin de les sensibiliser.

«Le dépistage n'est pas fait en fonction de trouver des solutions. La seule issue est d'avorter», déplore Suzie Navert, conseillère à la promotion et à la défense des droits à l'Association du Québec pour l'intégration sociale.

Les membres de la Coalition craignent que les couples n'aient pas accès à un choix libre et éclairé.

«Le commissaire a proposé plusieurs balises, il parle des conditions à mettre s'il y a un dépistage. On regarde comment ça se passe dans le milieu de la santé, le manque de personnel, le manque de services, et on n'y croit pas vraiment», dit Mme Navert.