Le mécontentement des infirmières du Québec à l'égard des heures supplémentaires obligatoires semble s'intensifier. Une vingtaine d'infirmières de l'Hôpital du Haut-Richelieu en Montérégie ont refusé d'entrer au travail hier soir pour protester contre le manque de personnel infirmier.

Selon la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), Régine Laurent, il ne serait pas étonnant que des infirmières d'autres établissements leur emboîtent le pas au cours des prochaines semaines.«Je pense que ça illustre le ras-le-bol qui s'est accumulé, accumulé et accumulé», a souligné Régine Laurent, qui est à la tête du syndicat qui représente 58 000 membres. «La situation empire d'années en années et malgré leurs âmes d'infirmières, elles sont de plus en plus nombreuses à dire ça suffit.»

Les heures supplémentaires obligatoires ont provoqué une première crise il y a trois semaines aux soins intensifs de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, lorsque les équipes de soir et de nuit ont refusé de rentrer au boulot. C'est le personnel affecté au quart de jour, qui a été forcé de rester auprès des patients.

Hier, c'était au tour des infirmières de l'Hôpital du Haut-Richelieu à imiter leur geste. Exaspérée par le temps supplémentaire imposé, une infirmière a remis sa démission. Une vingtaine d'autres ont manifesté leur mécontentement avec elle devant l'établissement de santé. Elles s'opposaient aussi à ce que six infirmières effectuent du temps supplémentaire à partir de minuit. Ce sont également les infirmières affectées à l'horaire de jour qui ont complété leurs heures. Après des négociations entre le syndicat et la partie patronale, les travailleuses ont accepté de rentrer au boulot vers 21 heures.

En entrevue sur les ondes de Radio-Canada, la présidente du Syndicat des professionnelles de la santé du Haut-Richelieu-Rouville (affilié à la FIQ) Sylvie Jovin, a indiqué que la tolérance des infirmières était «à la limite» d'imploser. La directrice générale adjointe de la clinique CSSS Haut-Richelieu-Rouville, Christiane Duval, a pour sa part affirmé que des ajustements pourraient être faits aux horaires, mais qu'à moyen terme, il faudrait agir sur l'achalandage à l'urgence de l'hôpital.

Régine Laurent estime que des manifestations comme celles qui ont eu lieu aux hôpitaux de Maisonneuve-Rosemont et du Haut-Richelieu pourraient vraisemblablement se multiplier dans les prochaines semaines si le gouvernement n'intervient pas rapidement.

«La ligne que je trace maintenant c'est qu'il n'y a pas de réelle volonté politique pour ne pas laisser couler les professionnels des soins», a-t-elle précisé.

«Les solutions ont été proposées dans je ne sais plus combien de comités depuis 1995. Il faut créer des postes à temps complet avec des heures garanties pour stabiliser les équipes et mettre en place des mesures pour attirer des nouvelles personnes dans la profession. Notre pourcentage de compensation pour le travail de fin de semaine n'a pas été indexé depuis 1989. C'est une question de reconnaissance et de valorisation», a-t-elle ajouté.

Il y a une semaine, la présidente de l'Ordre des infirmiers et des infirmières du Québec, Gyslaine Desrosiers, a affirmé dans une lettre ouverte que le temps supplémentaire obligatoire des infirmières «avait trop duré». «De toute évidence, c'est une mesure inacceptable qui nourrit l'insatisfaction et qui, à long terme, entraînera une augmentation de la pénurie», a-t-elle écrit.

 

Le ministère dit chercher des solutions

En entrevue avec La Presse, l'attachée de presse du ministre de la Santé, Yves Bolduc, Karine Rivard, a affirmé que le gouvernement s'efforçait à trouver des solutions pour améliorer l'organisation du travail des infirmières. Les représentants de la fonction publique et ceux du gouvernement négocient présentement les clauses de leurs prochaines conventions collectives.

«On invite les infirmières à la table de négociation pour nous aider à trouver des solutions», a-t-elle expliqué en faisant référence à la manifestation à l'Hôpital du Haut-Richelieu. «La problématique d'hier et celle de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont sont locales et se sont les établissements qui ont la responsabilité de la coordination des horaires», a-t-elle ajouté.

Avec La Presse Canadienne