Le gouvernement du Québec a annoncé hier après-midi le lancement de la construction du Centre de recherche du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CRCHUM). Le coût total de ce vaste projet, qui occupera le quadrilatère formé par les rues Sanguinet, Saint-Denis, Saint-Antoine et Viger, est de 470 millions de dollars.

«Nous franchissons aujourd'hui un pas très important qui nous mène de la période de la planification à celle de la réalisation», a annoncé le premier ministre du Québec, Jean Charest, en conférence de presse.

C'est le consortium Accès Recherche CHUM, le seul encore en lice, qui a obtenu le contrat, lequel comprend la construction, le financement, l'entretien et le maintien de l'immeuble durant 30 ans.

Le contrat définitif n'est toutefois pas encore signé puisque des détails techniques doivent encore être réglés. Mais Accès Recherche CHUM pourra commencer la démolition de l'édifice Vidéotron dès le 5 avril, et les fondations seront creusées au début du mois de juillet. Le CRCHUM, d'une superficie de 68 000m2, ouvrira ses portes en 2013.

Le projet de Centre de recherche est indépendant du projet du CHUM lui-même, dont la première phase sera achevée pour la fin de 2014. L'hôpital ne sera terminé dans sa totalité qu'en 2018.

Pendant ce temps, la construction du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) sera lancée ce printemps et devrait être achevée en 2014. Le directeur général du CHUM, Christian Paire, ne s'offusque pas du fait que l'hôpital anglophone soit prêt avant. «L'important, c'est qu'on voie s'édifier à Montréal deux grands centres universitaires», a-t-il dit.

Proche des libéraux

L'une des firmes principales du consortium Accès Recherche CHUM est Fiera-Axium Infrastructure. Le président de cette entreprise est Pierre Anctil.

Bien connu au Parti libéral du Québec, M. Anctil a été directeur général du PLQ de 1988 à 1993. Il a présidé deux commissions du parti dans les années 80. Il a été chef de la campagne du NON au référendum de 1995. M. Anctil a également été chef de cabinet du premier ministre libéral Daniel Johnson.

M. Anctil a ensuite été vice-président du groupe SNC-Lavalin. SNC-Lavalin est le gestionnaire de projet engagé par le directeur du projet de modernisation des CHU, Clermont Gignac.

Informé de ces éléments, le député du Parti québécois et critique de l'opposition officielle sur le Conseil du Trésor, Sylvain Simard, a exprimé une vive préoccupation. «Quand on voit qu'on a consenti à donner un contrat de plus d'un milliard de dollars à un consortium qui n'a pas de compétition et que, dans ce consortium se trouve un bonze du Parti libéral depuis 20 ans, ça devient drôlement inquiétant pour tout le monde», a déclaré M. Simard, qui croit qu'une enquête sur la construction est plus que jamais nécessaire.

Questionné en point de presse, le premier ministre Charest a repoussé ces propos en lançant: «Le PQ dit n'importe quoi.» M. Charest s'est dit «totalement à l'aise» avec le choix du consortium. «C'était un processus ouvert (...) M. Anctil est un homme intègre. Qu'est-ce qu'on peut dire de plus?» a-t-il déclaré.

Par ailleurs, l'Agence des partenariats public-privé n'existe plus. Mercredi soir, à 19h23, l'organisme a été intégré à Infrastructure Québec. Mais hier, tant M. Charest que la présidente du Conseil du Trésor, Monique Gagnon-Tremblay, ont défendu bec et ongles le principe de bâtir le CRCHUM selon la formule des PPP.

Pour M. Charest, il est «tout à fait normal» qu'un projet semblable atteigne «de très hauts niveaux de complexité». Il estime qu'il ne faut pas pousser les hauts cris au premier pépin rencontré. Il reste que, au départ, les premières estimations des coûts du CRCHUM étaient de 320 millions de dollars alors que l'actuel budget frôle maintenant le demi-milliard.

Pierre J. Hamel, chercheur à l'Institut national de la recherche scientifique (INRS), estime que l'annonce de la construction du CRCHUM en PPP est «triste, parce que ça va nous coûter plus cher que ce que ça aurait dû».

- Avec la collaboration d'André Duchesne