Le président du Collège des médecins, le Dr Yves Lamontagne, estime que la collaboration entre infirmières et médecins est souvent bancale en raison de la mauvaise organisation du réseau de la santé au Québec. Invité à participer à un débat au colloque annuel de l'Ordre des infirmières, le Dr Lamontagne a vivement critiqué une «structure trop lourde» dans laquelle «faire bouger tout le monde n'est pas une mince affaire».

La présidente de l'Ordre des infirmières, Gyslaine Desrosiers, a abondé dans son sens, tout comme Gaétan Barrette, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), et la présidente de la Commission infirmière régionale de Montréal, Hélène Baril. Tous ont par ailleurs critiqué au passage le ministre de la Santé, Yves Bolduc. «Pourtant, notre ministre est médecin», a lancé avec ironie Mme Desrosiers quand le Dr Lamontagne a reproché aux gestionnaires des hôpitaux de n'être que des «bureaucrates» coupés des besoins des patients. «Oui, mais pauvre ministre Bolduc! a répliqué le Dr Lamontagne. Prenez par exemple la procréation assistée: il est clair que les directives viennent d'en haut, du bureau du premier ministre», a-t-il lancé devant une salle remplie d'infirmières.

 

Bernard Derome, animateur du débat, a demandé au Dr Barrette s'il serait le prochain ministre de la Santé. «Peut-être un jour, a-t-il lancé sous un tonnerre d'applaudissements. Mais vous savez, en politique, on est populaire durant un an et, ensuite, on se fait détester durant trois ans.»

Contourner le système

Le Dr Gaétan Barrette a ensuite abordé le sujet du budget provincial, «décevant» selon lui parce qu'il ne permet pas de créer des postes d'infirmières praticiennes ou d'embaucher du personnel supplémentaire. «Il faut du budget, a-t-il dit. La situation actuelle demande un changement de culture. Et la cogestion fait partie des demandes des spécialistes auprès du gouvernement.»

Sans aller jusqu'à dire que les agences de la santé et des services sociaux, qui chapeautent les établissements au Québec, n'ont plus leur raison d'être, les quatre acteurs majeurs de la santé s'accordent à dire que, pour parvenir à donner des soins de qualité, il faut souvent «contourner» le système, le déjouer afin d'éviter des refus.

Le débat s'est terminé par un point de presse au cours duquel Dr Barrette a lancé un message au ministre de la Santé, qu'il a exhorté à s'ouvrir les yeux à la cogestion. «Le ministre Bolduc ne sait pas de quoi je parle quand je parle, donc il ne peut pas commenter ce qu'il ne connaît pas. Quand je parle de cogestion, je ne parle pas d'inventer une nouvelle structure administrative. Je dis que, présentement, dans le réseau, on ne se parle pas, on ne coordonne pas nos interventions. Dans le langage de bureaucrate, on veut rendre les gens imputables, mais on ne leur donne par les outils. Eh bien! Pour rendre le personnel imputable, il faut du personnel de plus.»