Les circonstances de la mort de Maurice Gibeau, survenue en décembre dans la ressource intermédiaire de la Résidence du Parc Jarry alors que le préposé de garde dormait et avait débranché les sonnettes d'alarme, n'ont pas été déclarées à sa famille, a révélé hier Radio-Canada. Alertée de la situation, la coroner Catherine Rudel-Tessier a ouvert une enquête. Pour des spécialistes des droits des personnes âgées, cet incident révèle les lacunes de notre système en termes de protection des aînés.

M.Gibeau résidait au quatrième étage de la Résidence du Parc Jarry. C'est à cet étage que sont répartis les 34 lits de ressource intermédiaire détenus par la Résidence du Parc Jarry. Ces lits sont subventionnés par le centre de santé et de services sociaux (CSSS) du Coeur-de-l'Île, qui n'a pas voulu commenter la situation pour respecter la confidentialité du dossier.

 

Mais selon Radio-Canada, la nuit du 13 décembre, le seul préposé de garde à l'étage de M.Gibeau a débranché les cloches d'appel et s'est endormi. Le décès de l'octogénaire a été constaté le matin. La famille du défunt a été avisée, sans toutefois que les circonstances exactes du décès ne lui soient communiquées.

Pour l'avocat spécialisé dans les causes médicales, Me Jean-Pierre Ménard, la famille de M.Gibeau aurait dû en être informée, car les incidents et accidents dans les ressources intermédiaires doivent être rapportés.

Mais Me Ménard croit que Québec doit aller plus loin afin de mieux protéger les aînés. «Il est temps que la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès soit actualisée», note l'avocat.

Actuellement, la Loi stipule que tous les décès survenant entre autres dans des prisons, des centres de la petites enfance et des centres de réadaptation doivent être déclarés au coroner. Les centres d'hébergement, les résidences privées de même que les ressources intermédiaires pour aînés échappent à cette obligation. «Il faut changer cela, surtout que plusieurs décès surviennent dans ces endroits», insiste Me Ménard.

Le juriste Louis Plamondon partage cette vision. Dans une étude publiée il y a quelques mois, M.Plamondon avait révélé que sur les 2393 décès de personnes âgées hébergées signalées au coroner pendant trois ans, 790 avaient été causés par de la négligence. «Et je ne parlais que des décès déclarés au coroner. Dans les faits, il y a en a beaucoup plus. Le fait que les décès d'aînés vulnérables ne soient pas automatiquement déclarés au coroner, c'est de la discrimination pure et simple», dit-il.

M.Plamondon se questionne aussi sur les contrôles exercés par les CSSS dans l'attribution de contrats de ressources intermédiaires. «Le propriétaire de la Résidence du Parc Jarry a obtenu 234 des 1152 places en ressource intermédiaire à Montréal. Il faut s'assurer que le cas exposé aujourd'hui n'est qu'une exception», dit-il.

La porte-parole de l'opposition officielle en matière d'aînés, Lisette Lapointe, a quant à elle demandé hier en Chambre pourquoi le CSSS, «qui a la responsabilité de ces personnes aînées hébergées» en ressource intermédiaire, s'est «fait complice du silence de la résidence privée» du Parc Jarry. La ministre déléguée aux Services sociaux, Lise Thériault, a répondu que l'enquête du coroner fera la lumière sur la question.