Estimant que les coupes exigées par le projet de loi 100 du gouvernement, adopté par bâillon vendredi, résulteront en une diminution des services à la population, le centre de santé et de services sociaux (CSSS) Lucille-Teasdale a adopté la semaine dernière un budget qui ignore volontairement les compressions que demande Québec.

Le projet de loi 100, qui met en oeuvre les mesures contenues dans le dernier budget, oblige les établissements de santé à sabrer leurs frais administratifs.

Dans une lettre envoyée au ministère de la Santé le 9 juin, le directeur général du CSSS Lucille-Teasdale, Gary Furlong, écrit que «les cibles de compressions budgétaires ne peuvent être atteintes sans avoir un impact sur les services à la clientèle et c'est illusoire et malhonnête de dire autrement». Le CSSS Lucille-Teasdale a refusé d'appliquer les 900 000 $ de compressions qui lui sont demandés dans son budget 2010-2011.

Le CSSS ne s'attendait pas à devoir absorber d'aussi grandes compressions. À la fin du mois de mai, l'agence de la santé et des services sociaux de Montréal lui a transmis son budget initial, dans lequel aucune compression n'était prévue. «Puis un peu plus tard, on a reçu les demandes de compressions budgétaires de 900 000 $ liées au projet de loi 100», explique M. Furlong, qui indique que ces coupes «auront des conséquences» et que le gouvernement «doit être transparent et le dire».

Par exemple, M. Furlong explique que les coupes exigées par Québec entraîneront des baisses de dépenses en informatique. Or, le gouvernement demande aux CSSS de créer des dossiers de patients informatisés. «Comment réduire nos dépenses en informatique en même temps ?» demande M. Furlong dans sa lettre.

Jacques Tricot, membre du conseil d'administration du CSSS Lucille-Teasdale, explique que les compressions résulteraient inévitablement en des baisses de services. «On demande de sabrer 25 % dans nos frais de déplacement, note-t-il. Ici, 80 % de nos frais de déplacement servent aux soins à domicile ! On voit que le discours du gouvernement disant que ces coupes ne toucheraient pas les services est faux.»

Frais de formation

La directrice générale adjointe de l'Agence de la santé de Montréal, Geneviève Massicotte, explique quant à elle que le gouvernement lui demande d'économiser 3 millions de dollars en ne remplaçant qu'un départ à la retraite sur deux et 1,5 million de dollars dans les frais de publicité et de déplacement. Mais le problème touche les coupes de 28,5 millions exigées pour les frais de formation.

Mme Massicotte affirme que la méthode de calcul qu'utilise le gouvernement pour fixer ces coupes «ne pouvait pas être utilisée intégralement». «Mais le gouvernement nous dit qu'on doit quand même enlever 28,5 millions en formation», note Mme Massicotte, qui soutient que cette somme est bien plus importante que ce à quoi les CSSS s'attendaient.

«Pour les CSSS, les baisses demandées en frais de formation sont environ 50 % plus élevées que prévu», affirme Mme Massicotte. C'est pourquoi certains établissements craignent de ne pouvoir respecter cette cible sans sabrer les services à la population.

«Pour nous, c'est clair : on ne veut pas réduire les services. Le Ministère estime qu'on sera capables d'atteindre la cible sans restreindre les services à la population. On va tenter d'y arriver. On va en discuter avec nos CSSS», indique Mme Massicotte.

De son côté, M. Tricot du CSSS Lucille-Teasdale espère que d'autres CSSS de l'île suivront la décision de boycotter les compressions budgétaires.

Joint en fin de journée hier, le cabinet du ministre de la Santé, Yves Bolduc, a dirigé La Presse vers le ministère de la Santé, qui nous a à son tour dirigée vers l'Agence de santé de Montréal.